Treize patients sous Levothyrox sont décédés

Treize patients sous Levothyrox sont décédés

Il n’est pas possible, pour le moment, de savoir si ces morts sont liées, ou non, au changement de formule.

Treize patients sous Levothyrox sont décédés depuis le 27 mars. C’est ce que révèle le magazine Ebdo dont le premier numéro est attendu en kiosque le 12 janvier. Il est cependant pour le moment impossible d’incriminer – ni d’ailleurs de disculper – la nouvelle formule du médicament.

Le nouveau Levothyrox du laboratoire Merck Serono, un traitement à destination des personnes ayant une thyroïde déficiente, avait été lancé fin mars 2017 à la demande des autorités sanitaires. Cela partait d’une bonne intention: l’Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM) avait constaté que l’ancienne formule n’était pas stable dans le temps, c’est-à-dire que la quantité de principe actif – molécule avec un effet thérapeutique – variait selon la date de prise du médicament. L’Agence souhaitait corriger ce problème, et n’attendait «aucun changement lié à la modification» de la formule.

Treize patients décédés

Pourtant, dès le mois de juin, certains patients sous Levothyrox (ils sont au total près de trois millions en France) s’organisaient pour dénoncer des effets indésirables de la nouvelle formule (maux de tête, vertiges, nausées, perte de cheveux etc.). Les autorités sanitaires leur ont alors demandé de déclarer ces effets secondaires sur le nouveau portail de signalement des effets indésirables du gouvernement.

Selon les données récoltées, treize patients sous Levothyrox sont décédés depuis la fin du mois de mars. Parmi eux, une femme de 87 ans, morte le 19 août d’un AVCischémique ou encore une autre de 85 ans, décédée le 9 septembre. Mais également «des patients plus jeunes, âgés de 39 ou 48 ans», note le magazine.

Dans un rapport du 10 octobre, le centre de pharmacovigilance de Rennes rapportait déjà quatre décès de personnes sous Levothyrox (entre le 27 mars et le 15 septembre 2017), «pour lesquels le lien avec le Levothyrox n’est pas établi». Or en y regardant de plus près, si pour deux décès l’action du Levothyrox peut être écartée, la réalité semble plus compliquée pour les deux autres.

«Ils n’en savent rien»

Aujourd’hui, il serait prématuré d’imputer ces décès à la nouvelle formule. Mais il est également impossible de certifier qu’ils n’ont rien à voir avec le changement du Levothyrox. Et c’est bien là tout le cœur du problème. Un expert de l’ANSM s’indigne d’ailleurs auprès du magazine Ebdo: «Mais comment l’ANSM ou le ministère peuvent-ils certifier qu’il n’y a pas de décès sous Levothyrox? Ils n’en savent rien.»

Pourtant, dans les colonnes de Libération le 11 octobre, Dominique Martin, directeur de l’ANSM, assurait que «les effets rapportés ne mettent pas en danger la vie des personnes.» De même, le député Jean-Pierre Door, chargé d’une «mission flash» sur le Levothyrox, concluait le 31 octobre devant la commission des affaires sociales de l’Assemblait nationale «qu’il n’y a pas de crise sanitaire mais une crise médiatique, autour de la nouvelle formule du Levothyrox.»

Une enquête judiciaire

Les autorités sanitaires étaient-elles, ou non, au courant du nombre de décès inscrits dans la base de données du centre de Rennes? Et si oui, comment peuvent-elles alors affirmer que ces décès sont liés, ou non, au changement de formule? Seule une enquête judiciaire peut établir le lien de cause à effet entre la nouvelle formule du Levothyrox et les décès. Une enquête préliminaire est d’ailleurs ouverte depuis le 15 septembre au Tribunal de Grande instance (TGI) de Marseille, seul tribunal avec celui de Paris à disposer d’un pôle de santé publique en France.

Au total, le centre de surveillance des médicaments de Rennes a recensé plus de 14 600 signalements d’effets indésirables, entre fin mars et mi-septembre. Selon leur rapport, quatre personnes ont vu leur pronostic vital être «mis en jeu» dont «seul un cas pourrait être en lien avec le changement du Levothyrox nouvelle formule». Enfin, il est notifié trois cas d’anomalie congénitale pour lesquels «le lien avec le Levothyrox nouvelle formule est difficile à établir».

Depuis l’automne, de nouvelles options thérapeutiques sont disponibles sur le marché français, notamment la L-Thyroxine Henning de Sanofi vendue en pharmacie depuis le 16 octobre. Le Thyrofix du laboratoire Unipharma devrait être commercialisé à partir de la première semaine de décembre dans l’Hexagone.

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