Levothyrox : les terribles témoignages de malades de la thyroïde
[Mis à jour le 28 août 2017 à 14h25] Si les médecins se veulent rassurants sur l’utilisation du levothyrox, les patients faisant un usage régulier ou quotidien du médicament sont nombreux à s’inquiéter. L’Agence nationale de la sécurité du médicament (ANSM) a lancé mercredi 23 août un numéro vert : 0800.97.16.53, accessible du lundi au vendredi de 9 heures à 19 heures pour « apporter des réponses aux nombreux patients se plaignant des effets secondaires de la nouvelle formule du levothyrox ». Résultat : plus de 70 000 appels en moins d’une semaine.
Il faut dire que l’inquiétude est palpable. Contactés par les médias, les patients souffrant d’effets secondaires rendent compte des troubles qu’ils estiment être causés par le médicament. Ainsi, Marie, 43 ans, opérée de la thyroïde en 2012, explique à LObs qu’après le changement de composition du levothyrox, elle s’est sentie très fatiguée. Perte de cheveux, migraines, langue enflée, perte de poids, problèmes intestinaux… Elle avait d’abord du mal à penser que tout cela puisse venir du médicament, avant de découvrir sur Internet que d’autres malades de la thyroïde souffraient de mêmes maux. « Je suis indignée. Je ne comprends pas. Nous sommes les premiers concernés, mais personne ne nous a prévenus qu’il y aurait une nouvelle version du médicament et qu’elle allait nous mettre dans cet état », dit-elle.
Autre témoignage, celui de Jean-Claude, 59 ans, dans les colonnes du Parisien. Ce malade de 59 ans explique avoir eu une terrible sensation de raideur dans les jambes, « comme si elles étaient tétanisées », avant que son état empire : « Je me levais le matin avec des crampes au cou. Elles se sont accentuées au point de devenir invalidantes, raconte le quinquagénaire. Ce qui m’a le plus fait peur, c’est quand ma vue s’est troublée et que j’ai eu des pertes de mémoire. J’oubliais des mots, des phrases », dit-il.
« Douleurs aux bras, vertiges… »
« J’ai pris du poids et mes chevilles étaient gonflées », constate de son côté Armelle. Interrogée par 20 Minutes, cette patiente qui prend du Levothyrox depuis 26 ans affirme ne pas avoir été mise au courant que la formule de son médicament changeait. « Je ne suis pas quelqu’un qui s’écoute, mais ces symptômes-là, je ne les avais jamais vus », déclare-t-elle. Armelle a commencé à prendre la nouvelle formule du Levothyrox en mars dernier. Outre sa prise de poids et ses chevilles gonflées, cette habitante du Gers a constaté d’autres troubles. « En juin sont venues les migraines et les nausées. J’ai commencé à perdre mes cheveux et avoir les yeux très secs le matin. En juillet, j’avais des douleurs aux bras auxquelles s’ajoutaient de légers vertiges et surtout une grosse fatigue« , détaille-t-elle.
Inquiète, elle se renseigne et découvre avec son mari qu’elle n’est pas la seule à rencontrer ces problèmes. Elle décide alors de fouiller dans sa pharmacie et retrouve une vieille boîte de comprimés. Le constat est sans appel : « Au bout d’une semaine, miracle, sans rien faire de plus, tous mes symptômes avaient disparu. J’ai perdu 3 kilos, j’ai pu remettre mes ballerines, les douleurs et la fatigue se sont envolées. Mais je n’avais de ces comprimés que pour trois semaines. Alors, depuis samedi, je suis repassée à la nouvelle formule et tout est revenu. »
Les effets secondaires du nouveau Levothyrox
Comme elle, trois millions de personnes en France prennent du Levothyrox pour lutter contre leurs problèmes de thyroïde, dont environ 80 % de femmes, ce qui en fait le huitième des médicaments les plus vendus en pharmacie. Pour eux, la différence entre l’ancienne et la nouvelle composition du médicament est criante.
Constipation, problèmes de concentration, troubles de la vision, pertes de mémoire, douleurs musculaires, nausée, malaises, tremblements, sensation d’étouffement, vertiges, maux de tête, déprime ou encore bouffées de chaleur, mais aussi, selon Chantal L’Hoir, fondatrice de l’AFMT (Association française des Malades de la Thyroïde), interviewée par Franceinfo (voir ici) des crampes, des emphysèmes pulmonaires* et des PSH (périarthrite scapulohumérale), les effets secondaires du Levothyrox dénoncés par certains patients sont nombreux.
Une pétition contre le Levothyrox
Intitulée « Contre le nouveau Lévothyrox dangereux pour les patients ! », la pétition a déjà recueilli plus de 100 000 signatures. Le texte de présentation de l’initiative citoyenne, qui s’adresse aux laboratoires fabriquant le Lévothyrox et à L’ANSM, explique que « pour les très nombreuses personnes qui sont obligées de prendre du Lévothyrox, un important problème se présente. En effet, les laboratoires ont décidé de changer certains excipients et il en résulte que trop de patients ne supportent pas le nouveau Lévothyrox, ils ressentent d’importants effets secondaires. Quand on sait qu’il est très difficile de stabiliser la TSH, il est inadmissible d’avoir modifié ce médicament », ajoutant que « les laboratoires ont pris cette décision sans prendre l’avis des patients concernés ». Malgré cela, la directrice des affaires médicales du laboratoire Merck France, Sylvie Chabac, indique au Parisien que la nouvelle composition serait adoptée au niveau européen.
Changement de la composition du Levothyrox
La formule du Levothyrox a changé en mars 2017 à la demande de l’ANSM, l’Agence nationale de la sécurité du médicament. Jean-Michel Race, directeur des médicaments en endocrinologie, explique que « l’objectif était de garantir une teneur en lévothyroxine plus constante dans le médicament ». Sylvie Chabac mentionne une autre modification dans la composition : « on a supprimé le lactose. On l’a remplacé par de l’acide citrique, un excipient qu’on retrouve partout dans l’alimentation, et par du mannitol, à toutes petites doses. » Cette nouvelle formule était donc censée être plus stable et mieux tolérée.
Suite aux témoignages, l’ANSM conseille aux patients de faire une prise de sang « quatre à huit semaines après le début de la prise de la nouvelle formule et de procéder à un signalement en cas d’effets indésirables », mais assure que « les modifications du Levothyrox ne changent ni l’efficacité ni le profil de tolérance du médicament ». Le ministère de la Santé indique quant à lui que : « les études de pharmacovigilance […] ne permettent pas, en l’état actuel des choses, de remettre en cause la nouvelle formule du Levothyrox, à bien des égards meilleure que l’ancienne ». Comme le rapporte Marine Brossard sur le plateau du 19/20, selon les autorités, « le vrai danger serait d’arrêter son traitement ». Et la journaliste de France 3 d’indiquer qu’en cas d’effets secondaires « vous pouvez aussi vous rendre sur le site du ministère de la Santé pour signaler les effets secondaires. Les témoignages recueillis vont permettre de mener une enquête de pharmacovigilance. »
*L’emphysème pulmonaire est une affection pulmonaire qui provoque l’augmentation du volume des alvéoles pulmonaires et détruit leur paroi élastique.
www.linternaute.com – Mathilde Debry,