Pour camoufler les effets secondaires des génériques
Face à la médiocrité des génériques du lévothyrox qui peuvent provoquent des déséquilibres hormonaux, l’ANSM, l’Agence Nationale de Sécurité des Médicaments et des produits de santé (ex-Afssaps), ordonne au fabriquant du produit original de modifier la teneur en produit actif de son médicament. Comment en est-on arrivé à modifier un médicament original pour qu’il s’adapte aux insuffisances des génériques? l’ASNM et son directeur, Mr Maraninchi ne mènent-ils pas là un combat idéologique visant à protéger les sacro-saints génériques plutôt que de penser à la santé des patients ?
L’histoire entre le lévothyrox et ses génériques est déjà ancienne. Le lévothyrox est un médicament indispensable pour les patients ayant une insuffisance thyroïdienne. On ne peut pas vivre sans hormones thyroïdiennes. Le lévothyrox est un médicament indispensable mais aussi un médicament ancien qui a donc rapidement pu être substitué par des génériques. Seulement, le lévothyrox fait partie de ces produits à marge thérapeutique étroite et donc difficile à équilibrer : une petite variation de dosage peut entrainer d’importantes conséquences chez les patients et déséquilibrer un traitement. C’est ce qui est arrivé à de nombreux patients traités par le lévothyrox et que les politiques de santé en France comme dans d’autres pays du monde, ont contraint à prendre un générique du produit.
Dès juin 2003, trois organisations médicales américaines, l’American Thyroid Association (ATA), l’Endocrine Society (TES), et l’American Association of Clinical Endocrinologists (AACE), représentant 4 600 médecins, s’alertaient de la décision de l’agence du médicament américain, la FDA, de valider les génériques du Lévothyrox. En unique concession, la FDA recommande de pratiquer régulièrement des dosages de TSH (thyréostimuline) dès qu’un changement vers un générique est réalisé. Selon une étude de l’American Thyroid Association (ATA) et de l’Endocrine Society (TES), 160 évènements secondaires ont été recensés lors de passages du lévothyrox aux génériques en 2007. La résistance aux génériques s’est étendue. Les associations (américaines) de patients demandaient à leurs adhérents de refuser le transfert aux génériques. En août 2008, les Docteurs Dietrich, Brisseau et Boehm, médecins d’Outre-Rhin, publient un article (Dtsch Med Wochenschr 2008 ;133 :1644-8) recommandant aux médecins la plus grande prudence dans le traitement de l’hypothyroïdie «car différents médicaments manquent de bioéquivalence et requiert un suivi ultérieur ».
En France, l’Afssaps (elle s’appelait encore ainsi à l’époque) tente alors de s’opposer aux attaques contre le générique du lévothyrox : céder sur un seul générique pourrait remettre en question toute la conviction délivrée par les slogans étatiques d’équivalence entre génériques et médicaments de marque. Les prescripteurs conservent leur droit de noter «non substituables » en face de la prescription de lévothyrox. Mais les patients sous lévothyrox, à qui un générique est délivré, subissent les même désagréments que les patients des autres pays. Une trentaine de cas de déséquilibre hormonal sont officiellement recensés. De nombreux forums, blogs et sites internet médicaux mettent en garde contre la substitution du lévothyrox. La solution serait encore une fois simple, supprimer les génériques du lévothyrox. L’Afssaps choisi une autre voie. Elle décide, en 2010, de la mise en place d’une étude de pharmacovigilance pour vérifier l’évidence. La mise en place de cette étude la contraint à placer le lévothyrox et ses génériques dans la liste des 77 médicaments sous surveillance en 2011, affolant une nouvelle fois les patients. Les résultats de l’enquête de pharmacovigilance identifient finalement près de 300 cas de déséquilibres liés à la substitution du médicament original par le générique : si l’enquête n’est pas rendue publique, elle fait l’objet d’un compte rendu succinct lors d’un réunion de l’Afssaps, le 24 janvier 2012 : “L’analyse des spécifications des produits à base de lévothyroxine (princeps et génériques) confirme qu’il existe une différence de teneur en lévothyroxine entre le princeps et les génériques et qu’il peut exister une différence significative entre les lots à libération et les lots à péremption. Ces différences pourraient alors expliquer la survenue de certains cas de déséquilibres thyroïdiens, comme l’a déjà pris en compte la FDA. Par conséquent, il va être demandé à tous les laboratoires titulaires d’une spécialité à base de lévothyroxine, de resserrer les valeurs de spécifications en principe actif à 95 – 105% de la teneur théorique et ce pendant toute la durée de vie du produit, même s’il n’est pas exclu que cela puisse entrainer une réduction de la durée de conservation de ces spécialités“.
Malgré cette nouvelle démonstration, les fonctionnaires de l’ANSM trouvent une astuce leur permettant de maintenir les génériques du lévothyrox sur le marché. Il suffit de demander au fabriquant du médicament original d’aligner la teneur en produit actif du lévothyrox sur celles des génériques. Raison évoquée, la teneur en produits actif doit être comprise entre 100% et 110% au moment de la sorties des lots de l’usine pour le lévothyrox. Or cette teneur s’altère avec le temps et légalement cette teneur doit être encore comprise entre 90% et 110% au moment de la péremption des lots. Mais la règle fixée aux génériqueurs du lévothyrox est différente : la teneur en produits actif doit être de 95% et 105% au moment de la sortie de l’usine et entre 90% et 105% au moment de la péremption. Ces règles différentes ont été fixées par l’Afssaps. Donc un patients traité par un lévothyrox récemment sorti de l’usine et qui est substitué par un générique aux limites de sa date de péremption sera inévitablement déséquilibré. L’ANSM a “saisi les fabricants afin d’harmoniser les autorisations de mise sur le marché du Lévothyrox et ses génériques en terme de spécifications de teneur en lévothyroxine sodique, c’est à dire les limites dans lesquelles la teneur en substance active peut varier pendant la durée de vie du médicament“. L’ANSM nous prouve donc que dorénavant, il est possible de demander à un fabriquant d’un médicament original de modifier son produit pour s’adapter aux génériques. N’est-ce pas une preuve supplémentaires que génériques et médicaments originaux ne sont pas tout à fait la même chose?
Les génériques ont été soit disant inventés pour générer des économies. Une boite de lévothyrox coûte 2,74 euros et une boite du générique du lévothyrox entre 2,11 euros et 2,17 euros. Toute substitution entraine d’inévitables prises de sang destinées à vérifier l’équilibre de la fonction thyroïdienne (contrôle de la TSH) comme l’Afssaps le rappelait aux prescripteurs dans un courrier daté de mai 2010 :”Compte tenu des variations individuelles possibles, l’Afssaps a souhaité informer les prescripteurs que, en cas de changement entre deux spécialités à base de lévothyroxine sodique : spécialité de référence vers spécialité générique, spécialité générique vers spécialité de référence ou spécialité générique vers une autre spécialité générique, une surveillance de principe de l’équilibre thérapeutique est nécessaire“. Or, un dosage de TSH coûte seulement 17 euros soit près de 6 mois de traitement par le lévothyrox. Quelle économie réalise la communauté avec ces génériques du lévothyrox? N’aurait-il pas été plus simple de quitter le dogme et de ne pas génériquer ce produit?
En tous les cas, certains osent ce que l’ANSM refuse de faire : L’agence du médicament Anglaise (MRHA) a elle purement et simplement retiré du marché le générique du lévothyrox 100 mcg fabriqué par le génériqueur Teva car il “pouvait entrainer une perte de contrôle de l’hypothyroïdie lors d’une substitution”.
Et rappelons le à tous, comme l’écrivait le Pr Lechat (Directeur de l’Evaluation Des Médicaments et des Produits Biologiques. à l’Afssaps) au médecin blogueur D. Dupagne en 2008, “ conformément à l’article R. 5121-1-5° du Code de la Santé Publique (CSP), une spécialité générique doit avoir la même composition qualitative et quantitative en principe actif, la même forme pharmaceutique que la spécialité de référence et présenter une bioéquivalence avec cette dernière“.
Source
COMMISSION NATIONALE DE PHARMACOVIGILANCE
Compte rendu de la réunion du mardi 24 janvier 2012
Direction de l’Evaluation des Médicaments et des Produits Biologiques Département de Pharmacovigilance
Saint-Denis, le 27 Mars 2012
LEVOTHYROX et génériques
ANSM 2012
Recommandations sur la substitution des spécialités à base de lévothyroxine sodique – Lettre aux professionnels de santé
Mise en garde sur le répertoire des génériques
Afssaps 25/05/2010
L’ANSM a demandé à Merck Serono une adaptation de la teneur en principe actif de Levothyrox
APM 15:39
MHRA suspends Teva licence for levothyroxine generic
Inpharm 21/02/12 at 09:55am
Crédit Photo Creative Commons by colors (Trompe-l’oeil)
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