Le Progres de Lyon, Incendies en Russie : les centrales nucléaires sous haute surveillance
e feu continue de se propager en Russie alors que la canicule s’installe. Moscou a été à nouveau envahi, hier, par la fumée des feux de tourbières rendant l’air irrespirable et la visibilité réduite.a fumée a également perturbé le fonctionnement des aéroports moscovites. Les passants sont contraints de se couvrir le visage avec des masques, dont les ventes ont explosé ces derniers jours. Le président russe Dmitri Medvedev a lui-même jugé « suffocante » l’atmosphère de la capitale lors d’une visite dans une centrale d’appel des urgences médicales de Moscou et a appelé les Moscovites à faire « preuve de patience ».
L’été 2010 devrait battre tous les records de chaleur à Moscou. Un maximum historique a été atteint la semaine dernière avec 38,2 degrés dans la capitale. Le nombre de décès en juillet a augmenté de plus de 50 % par rapport à l’année dernière, avec près de 5 000 morts supplémentaires dus à la canicule, selon les services de l’état-civil de la ville.
Le bilan officiel des pertes humaines dans les feux de forêt qui font rage sur des milliers d’hectares dans l’ouest du pays est passé hier de 50 à 52 morts, selon le ministère de la Santé. Les autorités ont dû faire appel aux volontaires, après avoir déplacé des missiles et organiser une surveillance des zones à risque nucléaire.
Dans la région de Tchernobyl, notamment, les incendies pourraient remettre en suspension des particules radioactives mais pas dans des quantités dangereuses pour la santé humaine. Les militaires russes ont abattu, hier, la forêt aux alentours du site nucléaire de Sarov, situé à 500 km de Moscou pour écarter définitivement le risque de propagation du feu. Tous les matériaux radioactifs du site ont également été évacués au début de la semaine.
Paris envoie dès aujourd’hui des experts pour définir une aide adéquate et recommande aux voyageurs de ne pas se rendre dans les régions concernées. La Russie, troisième exportateur mondial de blé, a annoncé jeudi qu’elle appliquait un embargo aux exportations de céréales. La chaleur a provoqué l’effondrement de ses récoltes et menace d’entraîner pénurie et hausse des prix sur les marchés intérieurs. Jeudi, le prix de la tonne de blé a grimpé à 230 euros en Europe, son plus haut niveau depuis deux ans et demi.
Un expert de la Food and Agriculture Organization (FAO) a estimé hier que « la situation sur le marché du blé, qui n’était pas grave, est devenue sérieuse ». Selon les observations réalisées par satellite, rapportées par la Nasa, les « feux sont tels qu’ils forment des pyrocumulus », un type de nuage généralement associé aux éruptions volcaniques. « Si la fumée était aux États-Unis, elle s’étendrait approximativement de Chicago à San Francisco ».
Le spectre de Tchernobyl ravive la crainte des malades souffrant de la thyroïde
L’incendie de certaines zones irradiées en Russie fait naître des craintes chez Chantal Garnier. À 58 ans, le quotidien de cette Jurassienne est rythmé par la maladie. Un traitement hormonal administré à heures fixes pour traiter ses problèmes thyroïdiens.
« Forcément, dès qu’un événement de ce type se produit, on y pense. Comme ça a été le cas en 2008 lors des incidents sur des sites nucléaires en Vallée du Rhône (fuite d’uranium au Tricastin et rejet de matières radioactives à Romans-sur-Isère, N.D.L.R.) » confie-t-elle.
Touchée depuis 1987 par ces graves problèmes de santé, elle se bat pour faire reconnaître que le nuage radioactif issu de la catastrophe de Tchernobyl est à l’origine de sa maladie. Depuis 1999, elle copréside l’Association française des malades de la thyroïde (AFMT), « une association par les malades et pour les malades, qui réunit 3700 adhérents, et qui aide toutes les personnes touchées par des pathologies thyroïdiennes » tient-elle à préciser.
Chantal Garnier fait partie des 653 personnes qui depuis 2001 ont porté plainte contre X, en estimant que la gestion déficiente de la catastrophe de Tchernobyl par les autorités françaises est à l’origine de l’augmentation des cas de cancers.
« Le procès tarde un peu à arriver » regrette-t-elle. « Pourtant aujourd’hui on a suffisamment de recul sur les événements et les conséquences sur la santé publique. Et les malades ont un vrai besoin de reconnaissance. »
Journal du Sud Ouest au 9 août 2010
Incendies en Russie : quels sont les risques pour la France ?
La Russie qui brûle encore, les éléments radioactifs piégés dans la végétation des zones contaminées par la catastrophe de Tchernobyl…. Et si la France était contaminée ?
Les incendies en Russie pourraient provoquer, comme en 2002 lors des feux gigantesques connus par le pays, une élévation de la radioactivité de l’air en France » annonce Le Parisien ce matin. Depuis que l’air est devenu irrespirable à Moscou, que plusieurs vols ont été annulés, que de nombreux Moscovites se couvrent le visage avec des masques, que le Kremlin est invisible, que les véhicules roulent en plein jour phares allumés pour se frayer un chemin dans le brouillard, l’inquiétude est grandissante en Europe.
« Quand des incendies de forêt atteignent la dimension prise en Russie, cela devient une catastrophe internationale et non plus seulement nationale. Les fumées, les suies et les cendres sont alors transportées dans l’air au gré des courants atmosphériques sur des centaines, voire des milliers, de kilomètres. » prévient Jacky Bonnemains, le patron de « Robin des Bois » sur TF1 News. Selon lui, la catastrophe russe pourrait remobiliser les particules radioactives de Tchernobyl et les transporter dans les fumées sur des milliers de kilomètres au gré des courants atmosphériques.
Philippe Renaud, chercheur à l’Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire, spécialiste de la radioactivité environnementale, tempère dans le JDD : » Les risques sont négligeables, en Russie comme en Europe ». Selon lui, »le seuil à partir duquel nous pourrions commencer à nous préoccuper serait de 1 000 becquerels ». Or, la mesure de césium 137 est évaluée à environ un becquerel en Russie, et 1,5 microbecquerel en France.
De son côté, Geneviève Baumont, chargée de communication à l’IRSN et ancienne experte de l’institut, explique dans Le Figaro que « S’inquiéter pour si peu revient à craindre une inondation après qu’il est tombé un millimètre de pluie ».
Dans un communiqué, l’Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN) résume clairement la situation : « Les radionucléides peuvent être pour partie libérés dans les fumées et ainsi conduire à une contamination de l’air. » En revanche » ces événements représentent de très faibles niveaux d’activité. Ils ne peuvent être mesurés qu’à l’aide de stations de prélèvement d’aérosols à grand débit, dont les filtres font l’objet de mesures à l’aide de techniques de laboratoire de haute performance permettant d’atteindre des limites de détection extrêmement basses ». Il conclut : » Les niveaux d’activité susceptibles d’être observés en France à la suite de tels phénomènes ne sont pas de nature à provoquer une inquiétude d’ordre sanitaire ».