Rupture de stock de Lévothyrox ?

Le médicament, vital pour les malades de la thyroïde, se vide des étals des pharmacies. La stratégie du laboratoire Merck est en cause. 

Dans une lettre au vitriol adressée à Marisol Touraine lundi dernier, l’Association française des malades de la thyroïde (AFMT) dénonce une « rupture de stock » de Lévothyrox. Prescrit à quelque 3 millions de patients en France, le médicament s’est effectivement raréfié sur les étals des pharmacies depuis le mois de juin. Certaines officines ont même été vidées de Lévothyrox, obligeant les personnes atteintes par la maladie à en trouver ailleurs.

« On ne peut pas parler de pénurie, mais nous avons des tensions d’approvisionnement », tempère François Bruneaux, directeur adjoint de la surveillance à l’Agence du médicament (ANSM). L’unique producteur du Lévothyrox, le laboratoire Merck Serono, vient en tout cas d’envoyer les stocks prévus pour le sol français vers les pays émergents, où des marchés se sont ouverts pour la multinationale. De plus, la firme pharmaceutique atteint à peine le niveau suffisant de conditionnement de médicaments pour répondre aux besoins en France.

Et pour cause : le 13 juin 2012, la direction a lancé un « plan de réorganisation » correspondant à la suppression de 267 postes en France, soit un tiers du total des emplois. Sur le site de Genève, affecté en grande partie au conditionnement des produits français, 470 postes sont également supprimés. Chantal L’Hoir, fondatrice de l’AFMT et auteure de la missive à la ministre de la Santé, ne mâche pas ses mots contre « le pouvoir de l’argent ». « Les scandales sanitaires en France ne sont pas une question de gauche ou de droite, c’est une question de santé aux mains des multinationales pharmaceutiques. »

Pour pallier le manque d’approvisionnement, les autorités sanitaires ont décidé d’importer des médicaments d’Italie, conditionnés dans d’autres boîtes. « Huit dosages différents existent, les patients doivent être particulièrement vigilants », avertit François Bruneaux. « Il manque encore certains dosages, détaille Chantal Garnier, coprésidente de l’AFMT. Le Lévothyrox n’est pas un médicament de confort mais de survie. »

BENOÎT DELRUE
VENDREDI, 9 AOÛT, 2013
L’HUMANITÉ

Vous aimerez aussi...