Le documentaire la Terre vue du cœur de la réalisatrice canadienne Iolande Cadrin-Rossignol, qui sort en France mercredi, voyage à travers l’écologie planétaire et interpelle sur les menaces que l’homme fait peser sur elle. A cette occasion, l’astrophysicien franco-canadien Hubert Reeves explique la nécessité pour l’humanité de s’engager le plus rapidement possible pour protéger la biodiversité dont dépend la survie de l’espèce humaine.

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Pourquoi avez-vous participé à ce documentaire, «la Terre vue du cœur» ?

L’objectif principal du film est donné dans son titre. On commence à connaître les menaces qui pèsent sur la Terre. Elle risque de devenir inhabitable à cause des pressions humaines. Même la présence de l’humanité sur Terre est devenue incertaine. Face à ce danger, l’éveil de la mobilisation se joue au niveau du cœur. Il faut que les individus se sentent concernés individuellement par ces enjeux. La sixième extinction de masse à laquelle nous assistons avance à une vitesse encore jamais vu dans l’histoire de la planète. Cela va provoquer des bouleversements mondiaux majeurs qui auront un impact irrémédiable sur nous.

Devant cet état des lieux catastrophique, avez-vous de l’espoir que nous puissions rétablir la situation ?

Un avenir meilleur est possible, grâce aux prises de conscience citoyennes que l’on voit émerger partout dans le monde. Il ne faut surtout pas dire que tout est foutu. Sinon ce sera foutu. L’avenir est ouvert, inconnu. Personne ne sait si l’homme va réussir à redresser la situation. Je veux croire que cette fois, il va réussir à faire les bons choix.

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Malgré les alertes scientifiques, la mobilisation semble rapidement retomber. Comment contrer cette inertie ?

Il faut mobiliser les gens en faisant appel à leurs émotions. Tout le monde ne réalise pas que l’espèce humaine est elle-même menacée. Mais l’état de la situation nous apparaît de plus en plus clairement grâce aux données scientifiques. Cela devrait provoquer une réaction humaine universelle. Ce qu’on appelle «le réveil vert» est très important : de nombreuses personnes sensibilisées sont déjà à l’œuvre. Il ne faut surtout pas se retrancher dans le pessimisme.

Comment les citoyens peuvent agir face à un problème si global ?

L’écologie rassemble un million de petits problèmes. Les gens doivent être en alerte et se demander «Comment je peux innover, agir ?» Cela ne va pas être simple. On ne retrouvera jamais notre planète telle qu’elle existait à l’époque préindustrielle. Le plus important aujourd’hui est de créer la prise de conscience et l’éveil qui mènent à la volonté d’agir.

Les actions citoyennes, pour réussir, doivent être relayées au niveau politique…

Oui, beaucoup de pays comme la France, le Canada et certaines villes américaines sont très actifs sur le sujet. Mais ces actions ne sont ni assez rapides ni à la hauteur des bouleversements causés par les humains. Il faut adopter une attitude militaire face à cette situation. On la retrouve dans les jeunes générations. Nous avons une bataille énorme devant nous : garder la planète habitable et préserver la vie. La nature nous a dotés d’une intelligence extraordinaire et nous dit maintenant dans son langage : «Débrouillez-vous avec pour ne pas vous exterminer.»