Crise du Lévothyrox : le café thyroïde d’Agen
30 % des malades en souffrance achètent leurs médicaments hors de France
Salle comble pour le deuxième café thyroïde d’Agen
Pour la deuxième fois, le café thyroïde d’Agen, organisé par Madame Juliette Rosales, faisait salle comble, ce samedi 9 décembre. Il aurait été difficile d’accueillir davantage de participants. Pourtant, l’émotion devant Johnny Hallyday disparu aurait pu dicter un autre choix
Le format choisi s’y prête : dialogues ouverts avec des professionnels de santé ; réponse précise aux demandes générales utiles à la plupart des malades ; échange d’informations et de solutions.
Cette fois-ci, l’interlocuteur principal était le Dr Jacques Guillet, conseiller scientifique national de l’association française des malades de la thyroïde. Quel est son profil ? Engagé très tôt dans la recherche, (prix européen de recherche), avec des expériences multiples, enseignement national, publications, notamment sur la thyroïde, en biologie, imagerie, gastro-entérologie, neurologie, urologie, pédiatrie, médecine, radio pharmacie, gestion avec les milieux administratifs de la santé…
Aux côtés de l’AFMT, sa présence au comité de suivi de la crise du Lévothyrox facilite la compréhension et l’accès direct aux sources d’information que sont la Direction générale de la santé (DGS) et l’Agence nationale de sécurité des médicaments (ANSM).
Voici une synthèse des principaux thèmes abordés
Questions et échanges concrets
Très vite les malades se sont plaints d’un rationnement. Les questions se sont succédées sur ce thème avec force, clarté, rapidité. Les échanges ont eu lieu entre les malades et avec le médecin sur un mode ouvert.
Le comportement des autorités et leurs responsabilités sont mises en cause par tous les malades. La gestion catastrophique de l’introduction des génériques du Lévothyrox en 2011 n’a pas été oubliée. Pas plus que la panne d’approvisionnement en ce médicament en 2013, résolue par l’importation du « Lévothyrox » italien (fabriqué en France à Bourgoin-Jallieu !) présenté alors comme identique. Discours à géométrie variable : par commodité pour les autorités, ce même médicament devient différent (pas exactement identique sur la granulométrie du lactose…). Ni le discours volontairement ambigu pendant des années pour cacher la pénurie croissante de médecins. La perte de confiance qui en découle rejaillit sur tout le système de santé vécu comme enchaîné par l’administration.
La réalité décrite par les malades est la suivante : difficultés d’accès aux solutions alternatives, liste d’attente, risques d’interruption des traitements déjà engagés avec les solutions alternatives au Lévothyrox, ou semble-t-il véritable interruption décrite par certains, alors même que la pérennité en était affirmée par la ministre.
En face, les proclamations successives : « fin de la crise du Lévothyrox » selon le rapport de la mission flash du docteur Door pour l’Assemblée nationale. Effet nocebo toujours asséné dans les médias, sans aucune preuve. Des centaines de milliers de boites de médicaments alternatifs au Lévothyrox nouvelle formule disponibles sans problème en pharmacie. Ainsi s’exprime le monde imaginaire confortable de certaines élites.
Réalité virtuelle
Les autorités ont changé de stratégie. Au déni des souffrances des malades jusqu’au mois de septembre a succédé la communication de crise, voire de combat. Il s’agit de bouleverser le terrain médiatique par des tirs de saturation de la communication sur le sujet, afin de faire oublier à l’opinion publique les éventuelles responsabilités. De faire croire que tous les problèmes sont résolus. De noyer les maigres moyens de communication des malades en souffrance. De décrédibiliser les relais médiatiques traditionnels en leur faisant endosser, par une sorte de contagion, l’image la plus détestable possible des réseaux sociaux
Les services de l’État se répandent donc dans les médias. Depuis quelques semaines, leur communication s’intensifie. Que des bonnes nouvelles ! Encore une nouvelle alternative au Lévothyrox ! Nous voici à cinq. Et encore 100 000 boîtes, 200 000, 300 000 de boîtes supplémentaires. Sa cible ? Non pas les malades, mais l’opinion publique. Cette dernière entend «effet nocebo » asséné pendant des semaines, « l’État prend soin des malades, leur donne le choix ». Elle ne comprend plus. De quoi se plaignent-ils donc ces malades qui ne sont pas malades puisqu’ils ont déjà tous les moyens de se soigner ?
Il devient alors plus facile d’achever de faire perdre leurs points de repères aux malades récalcitrants dont les souffrances ne veulent pas rentrer dans le traitement statistique des prévisions de l’État. Et d’essayer de leur imposer, malgré tout, la poursuite d’un traitement dont ils ne peuvent se passer, avec la nouvelle formule du Lévothyrox.
Ordonnances médicales commuées en tickets de rationnement parfois inutilisables
Les médecins n’avaient pas le choix. Mis devant une situation de crise, ils ont été enrôlés. Les autorités voulaient prudemment partager les responsabilités, c’est-à-dire se décharger partiellement des responsabilités en les transférant sur les représentants du corps médical (sociétés savantes notamment). Objectifs : répartir au moindre mal la pénurie de solutions alternatives à la nouvelle formule.
Dès ce moment, pour les malades, les ordonnances de leurs médecins se sont commuées en tickets de rationnement. Cependant, même avec ces tickets de rationnement, ils constatent qu’ils ne peuvent accéder normalement aux médicaments dont ils ont besoin.
Les services de l’État le savent. Au bas de leurs consignes destinées aux professionnels de santé et aux malades, il est précisé que l’approvisionnement des officines sera « rapidement progressif ». Toujours la même technique de communication : on annonce quelques centaines de milliers de boîtes mises à disposition dans les officines, on précise d’ici la fin du mois de… Ce qui signifie qu’elles ne sont pas disponibles dans leur intégralité au mieux avant la fin dudit mois … Mais ils font mine de ne pas s’en rendre compte. Pourtant, la quête de médicaments, y compris à l’extérieur des frontières, a été déjà répercutée à de multiples reprises dans les médias.
Plus de 30 % des malades sont allés chercher leur médicament à l’étranger
Et c’est cette réalité qui a motivé le déplacement en masse des malades au café-thyroïde. Ils ont eux-mêmes abordés ce sujet. Un sondage a été effectué pour déterminer le nombre de ceux qui sont déjà allés chercher leurs médicaments à l’étranger pour contourner le rationnement : plus de 30 % ! Parmi eux, certains ont fait les commissions pharmaceutiques pour une à cinq personnes.
Et il ne s’agit pas seulement de l’ancienne formule de Levothyrox. La L-Thyroxin Henning (Sanofi) est concernée.
Liberté, égalité, fraternité. L’État français Interdit la liberté de prescription au médecin, interdit l’égalité d’accès entre l’ancienne et à la nouvelle formule de Lévothyrox. Il soutient sans preuve une Doxa pour manipuler l’opinion publique et les professionnels de santé afin qu’ils se détachent de la fraternité par rapport aux malades qui souffrent. Heureusement, l’Europe leur donne la liberté d’accès.
La construction d’une inféodation
La communication des autorités inféode psychologiquement les professionnels de santé à un schéma restrictif masqué par les annonces successives et à un rythme rapide d’alternatives au Lévothyrox toutes sévèrement rationnées.
L’AFMT a résisté la première à la tentative d’enrôlement dont les associations de malades ont fait l’objet. Pour mémoire, la DGS les avait réunies pour obtenir leur contreseing au bas de l’ordonnance médicale collective qu’elle avait obtenue du corps médical pour gérer le rationnement. Le Comité de suivi prolonge cet objectif en « soft power » avec l’apparence de démocratie sanitaire.
Facilité par le confort ou la paresse intellectuelle, il est entretenu par les croyances en la perfection du système, en la perfection des leaders d’opinion, et par manque de temps (pénurie médicale).
L’objectif principal est d’étouffer la réflexion et d’effacer les responsabilités.
Conclusion
Le slogan « effet nocebo » vise à faire disparaître l’esprit scientifique qui fait la force de la médecine française (l’esprit d’accueil face au symptôme, suivi de l’analyse d’ensemble, la recherche de cause, puis les solutions ou espoirs thérapeutiques).
Il est frappant que la DGS soutienne un projet de recherche qui refuse que les symptômes associés au changement de formule soient parmi les critères d’inclusion. Et qui écarte certaines pathologies thyroïdiennes, même considérées comme équilibrées.
Pour l’Association française des malades de la thyroïde (AFMT), son but est moins d’aider les malades que de transformer un biais flagrant de l’étude de recherche potentielle en un nouveau syndrome : « le syndrome nocébéen »
Le corps médical est sans doute plus pragmatique que ne le souhaiteraient les autorités…
Notamment ceux qui prennent directement en charge les malades de la thyroïde.
Pour les autres, il faut lutter contre une véritable « doxa » instituée par construction des autorités et enchaînements d’influences.