Une loi indemnisera en France les victimes d’essais nucléaires
Reuters – 26.11.08 – Un projet de loi organisant l’indemnisation des victimes des essais nucléaires français au Sahara puis en Polynésie entre 1960 et 1996 sera présenté en janvier, a annoncé le ministre de la Défense Hervé Morin. Une liste de maladies liées aux effets de la radioactivité sera reprise dans ce texte, et les demandes seront prises en compte en fonction d’un seuil d’exposition qui sera précisé dans un décret, a dit le ministre dans plusieurs médias.
Jusqu’ici, l’Etat français refusait de reconnaître officiellement le problème et les victimes étaient donc contraintes de saisir la justice et de démontrer au cas par cas le lien entre leur maladie et leur exposition à des radiations pour obtenir éventuellement des indemnisations. Hervé Morin précise dans le Parisien que « le ministère de la Justice ne fera plus appel des décisions de justice qui lui sont défavorables ».
Environ 150.000 personnes ont participé en tant que personnel civil et militaire aux 210 essais nucléaires français – dont une cinquantaine en atmosphère – réalisés au Sahara algérien entre 1960 et 1962 puis en Polynésie française, sur les atolls de Mururoa et Fangataufa, entre 1966 et 1996. Le litige a provoqué de nombreux procès et depuis 2004, deux juges d’instruction parisiens du pôle de santé publique instruisent une information judiciaire pour « homicides involontaires et atteintes involontaires à l’intégrité physique » ouverte sur plainte de certaines victimes.
PAS D’INDEMNISATION AUTOMATIQUE Le projet de loi ne permettra pas forcément d’indemniser automatiquement toute personne aujourd’hui malade et ayant travaillé sur les sites nucléaires. « Nous pourrons refuser l’indemnisation dans le cas de maladies dont la cause est liée à d’autres risques, comme le tabac et l’alcool.
Nous voulons poser le principe d’une indemnisation des victimes mais seulement pour celles qui ont été exposées lors des essais », dit Hervé Morin au Parisien. Il explique le retard pris par la France pour l’indemnisation par « la place particulière du nucléaire en France » mais assure qu’un tournant va être pris.
« Nous devons reconnaître aujourd’hui les victimes, presque tous les Etats l’ont fait, la France ne doit pas déroger à cette règle ». Le phénomène est mal connu concernant la France, seules des études épidémiologiques limitées ayant été menées en Polynésie. Un rapport parlementaire remis en 2001 a conclu que les conséquences sanitaires y étaient « dérisoires », comparé aux Etats-Unis et à l’ex-URSS.