Ce sont les plus de 75 ans. Les « seniors », comme on dit pudiquement pour ne pas dire les vieux. Comme si c’était une injure, vieux, un crachat, une proscription.
Le Comité d’éthique parle de « dénégation collective » du vieillissement dans une société qui, à travers les médias, la pub, le débat public, les modèles de consommation et de réussite, pratique un « âgisme » brutal, violent, une véritable « discrimination », une « désinformation » constante. Cet âgisme est patent, ajoute le Comité, envers les personnes dépendantes (1,12 % en 2010, 2,26 % à l’horizon 2060) que nous concentrons dans des établissements d’hébergement, concentration qui ressemble fort à une « ghettoïsation ».
Non seulement c’est cher, non seulement le personnel est insuffisant mais cette « institutionnalisation forcée » développe chez les pensionnaires le « sentiment d’être de trop ».
Même chez les personnes âgées non-dépendantes, la solitude est un fardeau. 25 % vivent seules. 50 % n’ont plus de réseau amical actif. 79 % n’ont pas ou peu de contacts avec leurs frères et sœurs. 47 % n’ont pas ou peu de contactsavec leurs enfants. Et le Comité d’éthique conclut qu’il n’existe, pour elles, que deux issues : soit la résilience, la résignation à sa triste condition, soit « la dépression réactionnelle » de gens qui se laissent mourir.
Notre société, explique le rapport, finance volontiers les prouesses technoscientifiques, mais elle est incapable de « garantir à tous la santé, entendue comme un état de bien-être physique, mental et social ». Les aidants « naturels » ne sont ni valorisés ni rémunérés. Et l’on préfère enfermer les trop vieux et les trop dépendants dans des Ehpad plutôt que de leur réserver un ou deux étages dans des immeubles partagés.
Nous ne voulons plus de bêtes sauvages dans les cirques et nous avons raison. Mais quand nous préoccuperons-nous de cette sauvagerie-là ?