Thierry Hulot, veille sur la santé de Merck

LÉA DELPONT – LES ECHOS | 
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Thierry Hulot cultive l’art d’arriver à point nommé. L’homme a inauguré son fauteuil de patron de la division biopharma de Merck en France en même temps que le nouveau siège français du groupe allemand à Lyon.

A peine sorti des universités René-Descartes et Paris-Sud, ce pharmacien avait déjà intégré son premier laboratoire, Delagrange, à un moment clef de son histoire : l’entreprise, qui fabrique le Mitosyl et le Primpéran, serait rachetée cette année-là par Synthélabo.

De même, il avait rejoint la Lyonnaise Industrielle Pharmaceutique (Lipha) en 1995, le jour de son acquisition par Merck, coté au DAX et leader mondial des traitements contre l’infertilité et le spécialiste des cancers du côlon, notamment.

Chez Merck, créé en 1668, qui reste la plus ancienne société de produits chimiques et pharmaceutiques au monde, Thierry Hulot a commencé avec une mission taillée pour lui. Ce spécialiste de l’absorption des médicaments s’est vu confier le développement d’une forme retard du best-seller du groupe, le Glucophage, leader mondial des antidiabétiques et produit à 90 % en France. Désormais, le dirigeant de cinquante-trois ans a la charge de la division biopharma, la plus stratégique des trois activités en France de ce groupe, restée majoritairement aux mains de la famille fondatrice – à l’exception de l’ancienne filiale américaine, confisquée par le traité de Versailles et devenue MSD.

Dialogues indispensables

Né à Neuilly, Thierry Hulot est le fils d’un directeur des ressources humaines et d’une conférencière – « ce qui explique ma passion pour le mobilier XVIIIe français « ,raconte-t-il. Ce père de trois enfants, jeune grand-père, très attaché au bassin d’Arcachon, s’exprime avec le ton bienveillant d’un médecin. Il y en a eu dans sa famille. « Autrefois, en pharmacie, on cherchait de nouveaux traitements pour des maladies qui n’étaient pas soignées. Puis on a cherché à les rendre plus efficaces. Aujourd’hui, en troisième étape, on se concentre sur le confort du patient »,explique ce patron aux faux airs de Jacques Tati, qui n’a aucun lien familial avec un certain Nicolas.

« Travailler avec les associations de patients est devenu une priorité », de la même façon qu’il a fallu « apprendre à discuter avec les équipes marketing », se souvient-il, échaudé par le gâchis d’un médicament développé durant de longues années et jamais commercialisé. L’affaire l’avait d’ailleurs poussé à faire un MBA à l’université anglaise d’Ashridge, avec un mémoire précurseur sur ce dialogue indispensable entre chercheurs et marchés.

En 2004, Merck l’a appelé au siège de Darmstadt pour gérer les portefeuilles de projets, puis l’a envoyé en Suisse au moment du rachat de Serono en 2007. C’est à Genève qu’il a quitté le département R&D pour s’aventurer dans les sphères stratégiques, en tant que directeur de cabinet du patron de la branche pharma (en Suisse à l’époque). Il secondait Stefan Oschmann, actuel président du groupe.

En 2011, cet amateur d’art aux centres d’intérêt éclectiques – la peinture de la Renaissance, les impressionnistes, quelques Américains d’après-guerre et la sculpture animalière – a pris la tête d’une nouvelle unité (sur le point d’être cédée) vouée au développement des biosimilaires. C’est l’équivalent des médicaments génériques pour les biotechnologies, « mais en beaucoup plus complexe, car il s’agit de copier non pas une formule chimique mais des cellules vivantes. Il y a [entre les deux] à peu près la même différence qu’entre une bicyclette et un avion », résume-t-il.

De 2014 à l’hiver dernier, Thierry Hulot a ensuite piloté la production et la distribution des médicaments de Merck dans le monde. « J’étais basé en Suisse, je vivais dans l’avion »,avoue le dirigeant, heureux de retrouver Lyon. Après treize ans d’absence, il y revient avec de nouveaux traitements dans ses bagages : une formule innovante – réservée aux intolérants au lactose – du Levothyrox, qui déjà soigne 3 millions de Français pour des problèmes de thyroïde ainsi qu’une nouvelle forme orale de traitement contre la sclérose en plaques, une révolution dans cette maladie dégénérative.

Lors de ses rares moments libres, l’amoureux d’art aime courir les salles de vente, mais s’avoue « incompétent «  pour restaurer avec ses dix doigts ses achats. Il a un autre problème avec ses antiquités XVIIIe : elles logent assez mal son importante collection de BD.

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