La mise sur le marché, il y a six mois, d’une nouvelle formule du médicament thyroïdien Levothyrox, a mis au jour de nombreux cas de patients souffrant d’effets indésirables. Pierre (*), habitant de la région quimpéroise, raconte un calvaire de quatre mois qui est allé jusqu’à lui faire perdre son emploi.
Pierre est un homme en colère. Depuis quelques semaines, les effets indésirables du Levothyrox « nouvelle formule » se sont un peu estompés chez lui parce qu’il a pu obtenir un traitement, le L-Thyroxine, d’ordinaire réservé aux enfants ou aux personnes qui ne peuvent déglutir. « Mais si je n’avais pas eu ça, je crois que je serai devenu dingue », lâche ce quadragénaire installé en région quimpéroise.
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Depuis onze ans qu’il n’a plus de thyroïde, suite à un cancer, il est sous Levothyrox, avec pour objectif de maintenir un taux hormonal très bas pour ne pas « réactiver » des cellules cancéreuses car il n’a jamais été en totale rémission. « Jusqu’à présent, on avait trouvé le bon dosage avec mon médecin, et je vivais bien avec l’ancienne formule. »
Tout bascule le 1er mai alors qu’il entame une nouvelle boîte dont la pharmacienne lui explique brièvement « que seul l’emballage a changé ». « Pendant quatre mois, j’ai vécu un enfer, se souvient-il. Trois jours après le début de la nouvelle boîte, j’ai été pris de violents et permanents maux de tête, de troubles de la mémoire, je deviens agressif et dépressif, puis je suis extrêmement fatigué, j’ai mal aux articulations, au foie, aux reins… »
Sa tension artérielle passe d’un honorable 12.7 à plus de 16, les pulsations cardiaques s’emballent…
Symptômes handicapants
Les symptômes sont tellement handicapants que cet artisan ne peut plus aller travailler et se voit contraint de fermer son entreprise « avant qu’elle ne périclite ». « Moralité, aujourd’hui, je n’ai plus un seul revenu. »
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Finalement, fin août, il est reçu chez une endocrinologue, qui lui prescrit, avant que l’ANSM le lui déconseille, puis le réautorise, un traitement similaire sous forme de gouttes. Pierre le supporte bien mieux. « Il me reste des symptômes mais si je n’avais pas eu ça, c’est simple, j’aurais pris ma voiture et je serais allé à l’étranger acheter l’ancienne version du Levothyrox. »
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Il trouve aussi du soutien auprès d’une association de patients, dévouée et à l’écoute. Mais la colère n’est pas passée. Et à cela, s’ajoute désormais l’angoisse : « Mes analyses ne sont pas bonnes, j’ai peur que mon cancer ait été réactivé… ». Il a donc décidé de se battre : le 19 août, il a envoyé un signalement à l’antenne de pharmacovigilance de Brest et, chaque jour, il envoie une lettre à l’Élysée et au ministère de la Santé pour faire part de son « écoeurement » de n’être pas libre de choisir et de perdre une confiance « totale » envers l’ANSM.
* Le prénom a été modifié