Levothyrox : des chercheurs trouvent des impuretés inattendues dans certains médicaments
Mercredi 17 avril 2024 à 17:33
Par
- France Bleu Occitanie ,
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L’association française des malades de la thyroïde a présenté ce mercredi 17 avril les résultats d’une étude faite par des chercheurs toulousains et tchèques sur des médicaments à base de levothyroxine. Ils ont découvert un composé inattendu et qui n’a pas été déclaré par le laboratoire Merck.
C’est une publication scientifique qui ressemble à une petite bombe dans l’affaire du Levothyrox. L’association française des malades de la thyroïde (l’AMFT) a présenté ce mercredi 17 avril, à Toulouse, les résultats d’une étude faite dans un laboratoire tchèque depuis cinq ans, et à laquelle un chercheur toulousain a participé, sur des médicaments à base de levothyroxine. Cette étude a été publiée dans la revue Journal of Pharmaceutical Analysis.ⓘ
Des impuretés inattendues
Le Levothyrox, ce comprimé pris pour corriger les problèmes de thyroïde, est prescrit à trois millions de personnes en France, principalement des femmes. En 2017, le laboratoire Merck, qui le produit, a mis sur le marché une nouvelle formule. Des milliers de patients ont alors évoqué des effets secondaires (crampes, vertiges, fatigues, troubles digestifs). Merck a alors parlé « d’effet nocébo », expliquant que les patients imaginaient ces effets secondaires. « Cette nouvelle étude prouve qu’il n’y a pas d’effet nocebo généralisé », assure le docteur Jacques Guillet, conseil de l’AFMT.
Alors qu’ont trouvé les chercheurs ? Ils ont analysé des médicaments dans leur ensemble, pas juste une molécule, grâce à 1.000 boîtes envoyées par des patients et ils ont découvert de nouvelles réactions entre les excipients et des impuretés.
Parmi ces impuretés, il y a des phospholipides, « en quantités très abondantes et inattendues », explique Jacques Guillet.
Une étude initiée par l’AMFT
Ces phospholipides sont apportés par l’amidon de maïs, selon les chercheurs. Or, ils permettent au principe actif (la base du médicament) d’être plus ou moins bien absorbé dans le tube digestif et cela varie selon les personnes. Donc s’il y en a trop, cela peut provoquer des effets indésirables. Cette étude a été initiée par l’AFMT qui a déboursé 25.000 euros, mais ensuite les scientifiques ont travaillé bénévolement nous dit-on.
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Les procédures judiciaires relancées ?
Alors est-ce-que Merck, le laboratoire, savait ? Jacques Guillet veut croire que non, « en tout cas cela n’a pas été déclaré ». Sollicitée, l’entreprise pharmaceutique assure que l’impact de ces phospholipides a déjà été contrôlé. Elle s’interroge sur la méthodologie de cette nouvelle étude. « Merck s’étonne de certains choix méthodologiques, tels que l’utilisation de lots non identifiés, parfois périmés, dont ni l’origine ni les conditions de conservation ne sont décrites. »
Le laboratoire maintient être en conformité « en tout point à la réglementation en vigueur » et rappelle que la nouvelle formule du Levothyrox a été approuvée par les autorités sanitaires françaises et européennes.
L’avocat toulousain Maitre Jacques Lévy, lui, veut croire que cette étude donnera des arguments dans les procédures judiciaires. « Trois experts toulousains avaient conclu que mes clientes avaient des problèmes psychologiques. Je vais demander l’annulation de cette expertise. Et cela va permettre d’analyser au fond ce dossier et de démontrer que les modifications apportées au Levothyrox conduisent à des maladies dont souffrent les patients que je représente », explique-t-il.
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De nombreuses procédures judiciaires sont en cours dans ce dossier du Levothyrox. En octobre 2022, le laboratoire Merck a été mis en examen pour « tromperie aggravée » et placé sous contrôle judiciaire. L’ANSM (l’Agence nationale de sécurité du médicament) a été à son tour mise en examen pour « tromperie » quelques mois plus tard. Cette nouvelle étude devrait être versée au dossier.
Par ailleurs, une patiente toulousaine avait obtenu une victoire en juillet 2023, et en 2020, le laboratoire avait été condamné à verser 1.000 euros à chacun des 3.300 plaignants pour préjudice moral, pour défaut d’information sur la nouvelle formule du médicament.