LEVOTHYROX / LETTRE D’INFORMATION AUX AUTRES PAYS D’EUROPE ET MONDE

  • 28 AVR. 2018
  • PAR 
  • Les malades de la thyroïde informent les autres pays d’Europe de l’arrivée prochaine de la nouvelle formule Euthyrox / Eutirox chez eux. 44 groupes thyroïde français sont signataires de cette lettre traduite dans 6 langues. Elle met en garde les autres pays sur la nécessité d’exprimer leur refus de cette nouvelle formule tant que les aspects toxicologiques n’auront pas été éclaircis.

SYNTHESE :

Changement de la formule du Levothyrox® (Euthyrox/Eutirox) en France :
Mise en garde des patients des autres pays européens

Une crise sanitaire de grande ampleur est en cours en France depuis le printemps 2017, suite à la mise sur le marché d’une nouvelle formulation du Levothyrox de Merck (modification des excipients), en remplacement de l’ancienne formule (sous le même nom, mais avec un nouveau brevet). Dans les autres pays européens, ce médicament s’appelle Euthyrox ou Eutirox (pour l’instant, la formulation a été changée uniquement en France – mais le laboratoire annonce le déploiement partout en Europe d’ici la fin 2018).

Cette mise sur le marché s’est déroulée dans le contexte suivant :

• Etude de bioéquivalence sur volontaires sains, mais absence d’étude de switch sur de vrais patients en conditions réelles
• Information complètement insuffisante et inadéquate aux professionnels de santé et aux patients, indiquant une « absence d’effets attendus »
• Situation de monopole du Levothyrox de Merck sur le marché français des ventes de lévothyroxine (part de marché de 99% en 2017)
• Une inertie importante des pouvoirs publics qui a conduit à réagir trop tardivement et très incomplètement à la situation de crise sanitaire, toujours non réglée actuellement.

A fin novembre 2017, un nombre totalement inédit de signalements de pharmacovigilance a été enregistré (ce nombre continue à augmenter actuellement). L’enquête réalisée par les autorités sanitaires a montré que les effets indésirables rapportés étaient liés dans 10% des cas à un passage en hyperthyroïdie, 23% un passage en hypothyroïdie, mais surtout dans 67% des cas à aucune cause connue. Une étude scientifique doit être diligentée sous peu avec le concours des autorités sanitaires, et des analyses sont en cours. Pour l’instant, personne n’a d’explication sur ce qui provoque ces effets indésirables sans déséquilibrethyroïdien. Cette situation est extrêmement inquiétante.

Dans ce contexte, nous venons d’apprendre que sur les 3 millions de patients français sous Levothyrox, près d’un million ont basculé en catastrophe sur d’autres spécialités que le Levothyrox NF (situation à décembre 2017), malgré de grandes difficultés pour obtenir l’accès à des alternatives. Le manque d’anticipation et de réactions des autorités sanitaires a provoqué des situations de grande détresse pour
les patients, mais aussi pour les professionnels de santé.

Le déploiement de cette nouvelle formulation du Levothyrox de Merck est prévu pour toute l’Europe d’ici la fin 2018 (sous le même nom qu’avant : Euthyrox / Eutirox). C’est la raison pour laquelle nous attirons votre attention aujourd’hui. L’EMA a donné son feu vert, malgré nos alertes (qui n’ont pas été relayées par les pouvoirs publics français).

Les patients des autres pays européens ont la chance relative de ne pas se trouver dans un marché en situation de monopole tel que celui de la France. Toutefois les patients qui dans le reste de l’Europe prennent l’Euthyrox / Eutirox de Merck courent les mêmes risques que les patients français.

Sur la base de ce que nous avons vécu ces derniers mois, et compte tenu des nombreuses interrogations en suspens, nos points de vigilance et propositions d’actions sont les suivants :

• Faire connaître de manière anticipée et par écrit vos interrogations et préoccupations aux autorités sanitaires de votre pays, ainsi qu’à l’EMA. Exiger de véritables études de switch avant tout déploiement dans votre pays, dans l’attente des conclusions des procédures et études en cours en France.
• Informer les patients qui se trouvent actuellement sous Euthyrox/Euthyrox de Merck.
• Tout mettre en œuvre pour que les patients les plus fragiles ou les plus à risque (patients atteints de cancer, femmes enceintes, pathologies cardio-vasculaires…) soient surveillés attentivement au niveau biologique, voire qu’il leur soit proposé de switcher sur d’autres spécialités de manière anticipée (de même d’ailleurs pour tous les autres patients qui le souhaiteraient, dans un souci de prévention des risques).

Nous sommes à votre disposition pour répondre à vos questions.

Association Française des Malades de la Thyroïde (AFMT) : asso.thyroide@gmail.com
Association Vivre sans Thyroïde (VST) : info@forum-thyroide.net

LETTRE EUROPE :

Le 20 Avril 2018,

Changement de la formule du Lévothyrox® (Euthyrox/Eutirox) de MERCK en France :
Mise en garde des patients des autres pays européens

Chers amis,

Nous souhaitons vous informer de la grave crise sanitaire liée à l’introduction sur le marché français, depuis Mars 2017, de la nouvelle formule du Lévothyrox® du laboratoire MERCK (appelé Euthyrox ou Eutirox dans les autres pays européens) et qui, aux dires du laboratoire, devrait être commercialisée dans toute l’Europe fin 2018.

Faisant suite au dépôt de 7000 plaintes en France concernant cette nouvelle formule, le pôle santé du Tribunal de grande instance de Marseille a ouvert, Vendredi 2 Mars 2018, une information judiciaire contre X pour « tromperie aggravée, blessure involontaire et mise en danger d’autrui ». Des milliers de plaintes au civil ont également été déposées pour défaut d’information.

D’après les autorités sanitaires françaises, plus de 500.000 personnes se seraient détournées du Lévothyrox nouvelle formule pour prendre d’autres alternatives à base de lévothyroxine (nombre admis officiellement par notre ministère de la santé cette semaine). Mais pour l’association de malades «Vivre sans thyroïde », qui a analysé les données officielles rendues publiques par la Caisse nationale
d’assurance maladie, ce nombre, bien qu’impressionnant, est encore largement sous-estimé …et s’élèverait plutôt à un million (soit 1/3 des patients), si l’on prend en compte tous les patients qui achètent leur ancienne formule à l’étranger et ne figurent pas dans les données de l’assurance maladie, ainsi que les ventes de Lévothyrox nouvelle formule non consommées, délivrées en doublon avec les alternatives lors du dernier trimestre 2017. (Se reporter aux liens (1) et (2) en fin de lettre)

Comment en est-on arrivés là ? Voici la genèse de cette crise :

Le Lévothyrox étant en situation de monopole en France : il n’y avait, au moment de l’introduction de sa nouvelle formule, au printemps 2017, aucune alternative disponible pour les patients souffrant d’hypothyroïdie ou ayant subi une thyroïdectomie. D’après l’information officielle, ce changement de formule fait suite à une demande de l’ANSM au laboratoire MERCK, datant de 2012, sous prétexte
d’un manque de stabilité de l’ancienne formule (dont le brevet expirera en 2019). Le brevet pour la nouvelle formule a été déposé en 2014. Le laboratoire a alors remplacé l’excipient lactose par du mannitol et de l’acide citrique. Il n’y a pas eu d’essais cliniques, uniquement une étude de « bioéquivalence », réalisée seulement sur 200 sujets sains pour tester l’absorption sur 72 heures, mais qui ne permet pas d’évaluer les effets secondaires ni la bonne tolérance du Lévothyrox nouvelle formule sur le long terme chez de vrais malades.

Le Lévothyrox ancienne formule était consommé par environ 3 millions de patients en France ; même en supposant que le changement de formule n’affecterait qu’un petit pourcentage de ces patients, il fallait s’attendre à un nombre relativement important de patients présentant des intolérances et des effets indésirables. D’autant plus que des problèmes semblables s’étaient déjà produits dans d’autres pays (Danemark, Israël, Nouvelle-Zélande) lors de changements de formule d’autres spécialités à base de lévothyroxine, car il s’agit de médicaments « à marge thérapeutique étroite ». La moindre des choses aurait été de prévenir les patients et les médecins, et de leur conseiller une surveillance attentive suite au passage à la nouvelle formule. Or, le peu d’information diffusée a été incomplète et inexacte.

Un grand nombre de patients s’est alors retrouvé avec des effets indésirables parfois très handicapants (asthénie, douleurs musculaires et articulaires, troubles digestifs, troubles cardiaques graves, chute de cheveux, insomnies, vertiges, dépressions, prise de poids, troubles de l’équilibre, troubles de la mémoire …), sans comprendre pourquoi, et souvent sans trouver une écoute auprès de leur médecin à
qui les courriers officiels avaient assuré « qu’aucun changement n’était attendu pour les patients».

A partir du mois de Septembre 2017, et pour répondre dans l’urgence à la crise, le laboratoire MERCK, quant à lui, a formé ses visiteurs médicaux censés informer les médecins sur ses nouveaux produits. Pourtant, dès le 10 Juillet 2015, soit près de deux ans avant le lancement de la nouvelle formule, lors d’une réunion de notre agence du médicament ANSM et de responsables du laboratoire MERCK, « la nécessité d’organiser des paliers d’adaptation pour les populations à risque » avait déjà été soulignée.

Parmi les personnes concernées : celles atteintes d’un cancer ou de troubles cardio-vasculaires, les femmes enceintes, les enfants, les sujets âgés. Toutes ces personnes fragilisées n’ont cependant pas été protégées par nos autorités puisqu’on leur a imposé le passage à la nouvelle formule comme à tous les autres patients, avec comme seule recommandation une surveillance un peu plus attentive pour ces
groupes « à risque ».

Au 30 novembre, on dénombrait plus de 17.000 signalements documentés sur le portail du gouvernement (or, seule une partie des patients concernés avait fait cette démarche, relativement compliquée, leur nombre est donc beaucoup plus élevé).

Devant cette situation dramatique, la réaction du laboratoire MERCK et des autorités sanitaires françaises fut basée sur la négation, voire le mépris. Agnès BUZYN, notre ministre de la santé, n’a diligenté aucune enquête des services de l’État. En revanche, une association de patients, l’AFMT, a financé elle-même des analyses sur la qualité de la nouvelle formule dont les résultats ne sont pas encore communiqués.

L’association Vivre sans Thyroïde, de son côté, a assigné le laboratoire MERCK en référé-expertise, pour demander la communication de différentes informations ainsi qu’une analyse pharmaco-toxicologique indépendante de la nouvelle formule.

Devant l’ampleur des effets indésirables et, souvent, le manque d’écoute de la part des professionnels de santé qui avaient été informés à minima, les patients ont dû s’entraider sur les réseaux sociaux et acheter leur ancien Lévothyrox à l’étranger, à leurs frais. Les autorités françaises et professeurs en médecine ont même invoqué un « effet nocebo », voire une « hystérie collective », attribuant l’ampleur de la crise au seul emballement médiatique.

A l’automne 2017, suite à une pétition signée par plus de 300.000 personnes et aux échanges avec plusieurs associations, le ministère de la santé a fait délivrer en urgence une petite partie des stocks de l’ancienne formule et a ouvert le marché à d’autres alternatives (qui sont restées introuvables ou insuffisantes dans les pharmacies françaises pendant de longs mois, et sans savoir si elles allaient convenir aux patients). Le plus important dans ce scandale est qu’à aucun moment il n’a été question de produire à nouveau l’ancienne formule pour les patients qui étaient bien équilibrés avec ce traitement depuis de longues années, plus de vingt ans parfois.

Merck aurait répondu à une demande de l’ANSM de 2012 pour justifier le changement de formule. Mais l’argument de stabilité insuffisante du Lévothyrox ancienne formule ne tient pas si l’on considère l’étude de bio-équivalence réalisée par MERCK qui démontre que celle-ci est parfaite entre les deux formules sur une durée de 18 mois. Il s’agit de plus de la durée de péremption de la nouvelle formule.

Quelles sont donc les vraies raisons de ce changement de formulation ? Le fait que le brevet de l’ancienne formule va bientôt arriver à échéance ? Le désir du laboratoire de conquérir le marché asiatique (où l’intolérance au lactose est beaucoup plus fréquente qu’en Europe, et où MERCK vient de construire une gigantesque usine) ?

Le laboratoire MERCK, après la France, a prévu de généraliser sa nouvelle formule dans tous les pays européens d’ici la fin de l’année 2018, tout en excluant définitivement le retour à l’ancienne.

Pourtant, l’enquête de pharmacovigilance de l’ANSM, sur la base de plus de 17.000 signalements reçus, publiée le 30 janvier 2018, laisse beaucoup de questions sans réponse : pourquoi 2/3 des patients concernés ont-ils eu des effets indésirables avec une TSH pourtant parfaitement normale ? Pourquoi ces patients associent-ils souvent des symptômes contradictoires (hypo et hyperthyroïdie en même
temps) ? Pourquoi, chez 2/3 des patients, les symptômes s’améliorent, souvent en quelques jours, dès qu’ils reviennent à l’ancienne formule (ou passent à une autre spécialité) ?

Les symptômes dont souffrent actuellement les malades devraient être le point de départ d’études, pour en découvrir les causes et proposer des solutions thérapeutiques. C’est l’essence même du raisonnement médical. L’ANSM et la DGS lui tournent le dos avec le projet d’une expérimentation en cross-over, trop limitée en effectif, durée et puissance par rapport à la variété des symptômes, et d’autant plus
inutile qu’elle a déjà été effectuée en dimension mondialement inégalée, sur près de 3 millions de malades.

Le Vice-président de l’ANSM, Claude PIGEMENT, insiste pourtant : « une étude scientifique précise de ce qui s’est passé avec ce médicament s’avère nécessaire. » Cf article sur les résultats de l’enquête de pharmacovigilance du VIDAL.fr.

Dans ce contexte, il paraît évident qu’il serait prématuré d’introduire la nouvelle formule dans d’autres pays.

Nous alertons donc les patients sous Euthyrox (ou Eutirox selon les pays), sur la nécessité d’exprimer votre détermination pour ne pas vous laisser imposer un changement de formule dont ni les autorités ni le laboratoire n’ont pu nous prouver la réelle nécessité ni trouver les raisons de tant d’effets indésirables chez autant de patients français. Les personnes à risques (atteintes d’un cancer ou de pathologies cardiaques, femmes enceintes, enfants, personnes âgées …) devraient envisager de switcher vers une autre alternative tant que cela est faisable tranquillement et non sous pression. Une prudence particulière s’impose pour les femmes enceintes qui doivent absolument éviter de prendre la nouvelle formule Euthyrox (ou Eutirox), tant que les aspects toxicologiques n’auront pas été éclaircis.

Nous vous invitons à écrire à l’Agence sanitaire de votre pays ainsi qu’au Ministère de la santé, à l’EMA, au Président de la Commission européenne, pour leur faire connaître votre opposition de principe à tout changement.

Nous resterons bien évidemment à votre disposition pour vous informer de la suite de cette crise, dont beaucoup d’entre vous risquent, comme nous, d’être les victimes.

Bien à vous,

Les Patients français victimes du nouveau Lévothyrox

Contact : Investig.action.levo@gmail.com

Associations :

Association Française des Malades de la Thyroïde (AFMT) – http://www.asso-malades-thyroide.fr
Vivre sans Thyroïde (VST) – https://www.forum-thyroide.net

GROUPES THYROIDE FRANÇAIS SIGNATAIRES :

  • AFMT- Association Française des Malades de la Thyroïde
  • VST- Association Vivre Sans Thyroïde
  • Agir pour le retour de l’ancienne formule levothyrox (2609 membres)
  • Collectif 05 contre le nouveau Levothyrox (78 membres)
  • Collectif Champagne Ardenne VNLO (125 membres)
  • Collectif Grand Est des malades du lévothyrox NF (117 membres)
  • Collectif Levothyrox 47 (47 membres)
  • Collectif Papillons libres Rhône Alpes Auvergne (339 membres)
  • Collectif Thyroïde Plainte Levothyrox 44 / 49 / 85 (45 membres)
  • Collectif Victimes Levo Reims Grand Est (117 membres)
  • Collectif des Victimes du Nouveau Levothyrox en Occitanie
  • Détresse Thyroïde (41 membres)
  • Groupe Collectif des Victimes du Nouveau Levothyrox Nièvre (58 membres)
  • Groupe de Parole sur le levothyrox (département 33) (523 membres)
  • Hashimoto, Basedow et autres maladies de la thyroïde (2734 membres)
  • Hypo-Hashi-Hyper-basedow (3603 membres)
  • Le Levothyrox 21 Groupe de parole et d’échange (94 membres)
  • Les Papillons du 17 (effet indésirable de la NF du levothyrox) (45 membres)
  • Levo NF Breizh (Bretagne) (432 membres)
  • Levo NF Île de France (45 membres)
  • Levo Tous pour une plainte (406 membres)
  • Levothyrox départements 44 & 85 (158 membres)
  • Levothyrox et thyroïde 66 et au-delà … (158 membres)
  • Levothyrox nouveau Hérault 34 (27 membres)
  • Levothyrox nouvelle formule – groupe du 62-59 (214 membres)
  • Levothyrox nouvelle formule – Thyroïde (16 267 membres)
  • Levothyrox nouvelle formule – collectif Île de de France (91 membres)
  • Levothyrox nouvelle formule – Effets secondaires (3009 membres)
  • Levothyrox nouvelle Formule , Parlons-en (366)
  • Levothyrox nouvelle formule Thyroïde Arnaque (3112 membres)
  • Levothyrox Paca (258 membres)
  • Levothyrox Rhône-Alpes Auvergne (342 membres)
  • Liberthyrox (73 membres)
  • Problèmes de Thyroïde, groupe d’échanges (14 653 membres)
  • Problèmes de Thyroïde, Hypothyroïdie (12 561 membres)
  • Qui veut le retour de l’ancienne formule du Levothyrox ? (2200 membres)
  • SOS Thyroïde Corse – Tous en marche pour notre santé (529 membres)
  • Thyroïde Région parisienne (335 membres)
  • Thyroïde – Infos (2999 membres)
  • Union des Papillons libres (986 membres)
  • Victimes du nouveau levothyrox 65 (44 membres)
  • Victimes du nouveau levothyrox du 34 (42 membres)
  • Victimes du nouveau levothyrox du 81 (56 membres)
  • Victimes du nouveau levothyrox en Alsace (331 membres)
  • Victimes du nouveau levothyrox en Occitanie du 32 (25 membres)
  • Vivre sans thyroïde FB (5156 membres)
  • Vivre sans thyroïde on en parle ici (7102 membres)

    REFERENCES :

(1) Communiqué VST : https://www.forum-thyroide.net/pdf/Communique_VST_10-mars-2018.pdf

(2) Graphiques des analyses : https://www.forum-thyroide.net/pdf/VST_Levothyrox_dossier_graphique_analyses.pdf

(3) Communiqué AFMT : https://www.afmthyroide.fr/index.php/2018/03/12/quand-lansm-et-la-dgs-senfoncent-dans-la-crise-sanitaire-quelles-ont-cree/

(4) Analyse de l’enquête de pharmacovigilance (VIDAL) :
https://www.vidal.fr/actualites/2256/nouvelle_formule_de_levothyrox_nombre_totalement_inattendu_de_signalements_d_effets_indesirables/

 

Nouvelle formule de LEVOTHYROX : nombre « totalement
inattendu » de signalements d’effets indésirables
Par Jean-Philippe RIVIERE – Date de publication : 01 Février 2018 sur Vidal.fr

L’enquête nationale de pharmacovigilance de l’ANSM publiée le 30 janvier 2018 montre une »fréquence de signalement totalement inattendue » d’effets indésirables avec la nouvelle formule du LEVOTHYROX. Par ailleurs, dans deux tiers des cas, ils surviennent sans
déséquilibre thyroïdien biologique (lorsqu’un suivi adéquat de la TSH a été effectué). Notons également que le pic déclaratif de survenue des symptômes était en juin-juillet 2017, soit avant la crise médiatique consécutive à des témoignages d’associatifs ou de personnalités
dans les médias, ce qui relativise le poids avancé par l’ANSM d’un « effet amplificateur dû au nouveau portail de signalement et aux réseaux sociaux » (et ce qui relativise aussi, voire invalide, l’hypothèse d’un effet nocebo).

Par ailleurs, selon les auteurs de ce rapport, ces effets indésirables ne sont pas nouveaux, propres à cette nouvelle formule. Mais aucune explication n’est avancée pour expliquer ces effets indésirables, mêlant signes d’hypo et d’hyperthyroïdie à bilan normal ou perturbé.
Afin de davantage explorer les conséquences de ce changement de formule et de l’arrivée consécutive d’autres médicaments à base de lévothyroxine, l’ANSM va procéder à d’autres investigations, en particulier à partir des données de l’assurance maladie (SNIIRAM).

Pour Claude Pigement, vice-président de l’ANSM interrogé le 30 janvier par le Parisien, le fossé se creuse entre élites médicales et patients. Il faudrait donc aussi compléter ces investigations par « la publication de l’intégralité du rapport de pharmacovigilance de 2012 »,
à l’origine du changement de formulation (actuellement uniquement disponible sous forme très résumée, ce qui interpelle les associations de patients).

La TSH était normale chez 67 % des personnes prenant la nouvelle formule de LEVOTHYROX et ayant effectué un signalement d’événements indésirables.
Un rapport de pharmacovigilance qui complète celui publié en octobre 2017 La mise sur le marché de la nouvelle formule de LEVOTHYROX en mars 2017 a été accompagnée de la mise en place d’une enquête nationale de pharmacovigilance par
l’ANSM.
Les premières données de cette enquête (« première enquête ») ont été publiées en octobre 2017. Elles montraient notamment une fréquence élevée des signalements et l’apparition de signes d’hypo ou d’hyperthyroïdie malgré des dosages de TSH dans les normes attendues, ce qui intriguait les auteurs du rapport (voir notre article).

L’ANSM a donc publié le 30 janvier 2018 les données complémentaires issues de l’analyse des signalements effectués entre le 15 septembre et le 30 novembre 2017 (« deuxième enquête »).

Plus de 17 000 signalements d’effets indésirables aux autorités :

Les signalements d’effets indésirables chez les personnes prenant du LEVOTHYROX effectués sur la base nationale de pharmacovigilance (via le portail signalement-sante.gouv.fr) se sont élevés, depuis mars 2017, à 17 310 (0,75 % des 2,3 millions
d’utilisateurs de la nouvelle formule) : 5 062 dans la première enquête (fin mars – mi-septembre 2017) et12 248 dans la deuxième enquête (mi-septembre – fin novembre2017).

Cette fréquence élevée a été qualifiée par les auteurs du rapport « d’inédite » et de « totalement inattendue ». Il faut y rajouter tout ou partie des 18 000 signalements effectués directement au laboratoire Merck depuis mars 2018 (impossibilité de savoir si ces signalements sont des doublons, ou non, de ceux effectués sur signalement-sante.gouv.fr).

Un pic de symptômes survenus avant la médiatisation :

Ces effets indésirables sont majoritairement survenus entre avril et septembre 2017, avec un maximum en juin et juillet, ce qui semble réduire le rôle de la médiatisation, et donc écarter aussi, au moins partiellement, le rôle éventuel d’un effet nocebo (perception de symptômes inhabituels suite à une rumeur, une médiatisation de tels symptômes, ou survenant tout simplement en lisant la notice).

Par contre, la date de saisie de ces effets indésirables est majoritairement survenue en septembre, soit après l’éclatement de la crise, comme le résume ce graphique de l’ANSM :

Les patients signalaient en moyenne 5 effets indésirables (de 1 à 36).
Les signalements concernaient le plus souvent des femmes (90,4 %, sachant que ce médicament est également utilisé essentiellement par des femmes), l’âge moyen était de 55 ans (plus ou moins 13 ans).
Le nombre de cas pédiatriques était de 17.
Signes généraux, neuro-psychiatriques, musculo-squelettiques… : les effets indésirables les plus souvent signalés

Les effets indésirables rapportés aux autorités sont similaires lors de la première enquête et de la deuxième enquête, avec une prédominance globale de (par ordre de fréquence) :

Symptômes généraux : fatigue (9,4 % des signalements), « asthénie » (fatigue générale, déprimante.. : 3 %).

Affections du système nerveux : maux de tête (céphalées 6,2 %, migraine 1,1 %), perturbation de l’attention (1,2 %), amnésie (1,1 %).

Affections psychiatriques : insomnie (4,5 %) troubles du sommeil (1,2 %), irritabilité (1,8 %), dépression (1,5 %).

Affections musculo-squelettiques : contractures musculaires (4,2 %), douleurs musculaires (2,8 %), douleurs articulaires (2,3 %).
 Affections gastro-intestinales : nausées (2,4 %), diarrhées (1,6 %).
 Investigations (mesures cliniques ou biologiques) : prise de poids (3 %), TSH augmentée (1,7 %).
 Affections cutanées : chute de cheveux (4,7 %), sueurs profuses (1,2 %).
 Affections de l’oreille : vertiges (5,5 %), acouphènes (0,2 %).
 Affections cardiaques : palpitations (1,8 %), tachycardie (0,9 %), arythmie (0,2 %).
 Affections oculaires : troubles visuels (0,9 %)
 Affections respiratoires : dyspnée (0,8 %).

Les symptômes signalés directement au laboratoire Merck entre mars et fin novembre sont du même ordre, avec une prédominance des signes généraux, neuro-psychiatriques et musculo-squelettiques.
19 cas de décès rapportés et analysés, sans lien retrouvé avec la nouvelle formule du LEVOTHYROX

Selon l’ANSM, pour les 19 décès enregistrés dans la base de pharmacovigilance (malaise et décès à 85 ans, mort fœtale, insuffisance respiratoire aiguë, suicide, etc. : détails dans le rapport complet pages 20-22), « on ne peut retenir ou exclure formellement [un lien avec la prise du] LEVOTHYROX nouvelle formule ».
Dans deux tiers des signalements suffisamment documentés, la TSH était normale.
1 745 déclarations d’effets indésirables comportaient des analyses biologiques suffisamment documentées.

L’analyse de ces 1 745 déclarations montre qu’en cas de signalement de symptômes :
 67 % (1 172 déclarations) étaient associées à une TSH normale (euthyroïdie)
 23 % (394 déclarations) étaient associées à une TSH élevée (hypothyroïdie).
 10 % (179 cas) étaient associés à une TSH basse (hyperthyroïdie).

Ces proportions sont conservées lorsque l’analyse s’effectuait par tranches d’âge, ou en fonction du BMI (indice de masse corporelle).
Les symptômes sont proches que les patients aient une TSH basse, normale ou élevée,même si, logiquement, le nombre de troubles neuro-psychiatriques et cardiaques paraît un peu plus élevé en cas d’hyperthyroïdie (cf tableau page 34 du rapport).

De même, la répartition des résultats biologiques semble similaire en fonction des indications pour lesquelles LEVOTHYROX est utilisé.
Une discordance biologie – symptômes déjà constatés auparavant.

L’ANSM fait remarquer qu’une étude récente a déjà permis de constater la survenue de symptômes anormaux sous lévothyroxine avec une TSH normale (Mc Millan et al.2016).
Une autre étude (Hennessey et al. 2010) montre la survenue de symptômes à la fois d’hypo et d’hyperthyroïdie chez des patients dont la TSH a varié, suite à un changement de formule (89 %) ou non (11 %).

D’autres études ont tenté d’analyser un lien entre variations de la TSH et symptômes dépressifs, mais avec des résultats difficiles à interpréter –populations différentes, âge, effectifs, etc.).

Reconnaissance de l’impact péjoratif possible de certains de ces effets indésirables :

Le rapport sur l’enquête de pharmacovigilance souligne « le poids [des 339 effets indésirables codés comme sévères] en termes de gêne dans la vie quotidienne,rapportée par les patients (conduite et marche notamment) ».
Des effets indésirables survenant en général rapidement, et disparaissant souvent en cas de changement de spécialité (ce qui est possible depuis l’automne 2017).
Dans un cas sur deux, les effets indésirables sont apparus en moyenne dans un délai inférieur à 1 mois après le passage à la nouvelle formule de LEVOTHYROX.
Les symptômes se sont améliorés dans 20 % des cas, « en particulier chez ceux ayant switché pour une autre spécialité », ce qui « conforte l’importance de la mise à disposition [progressive] d’alternatives thérapeutiques » depuis l’automne 2017.

Cependant les patients qui ont switché vers une autre spécialité ont pu avoir du mal à continuer leur traitement avec la même alternative, en raison de difficultés d’approvisionnement.

« Pas d’hypothèse satisfaisante à la survenue de ces effets » :
Au terme de leur analyse, les auteurs du rapport sont perplexes, n’ayant pas pu identifier d’éventuels patients à risques ni formuler d’hypothèse satisfaisante à la survenue de ces effets indésirables non spécifiques, avec ou sans perturbation de la TSH, évoquant des signes d’hypo ou d’hyperthyroïdie.

De même, les auteurs ne peuvent pas identifier un lien direct entre la survenue de ces symptômes et la composition de cette nouvelle formule de LEVOTHYROX.

Etude à l’échelle nationale :

Cette enquête sur les signalements de pharmacovigilance va être complétée par les études menées par le pôle « Epidémiologie des produits de santé » de l’ANSM sur la base de données de l’assurance maladie (SNIIRAM), comprenant une étude d’utilisation
et une étude de risque.
Pour le vice-président de l’ANSM, le fossé se creuse entre les élites médicales et les patients. Il faut donc aller plus loin pour expliquer ce phénomène.
Comme nous l’avons vu, un nombre important d’effets indésirables a été rapporté, sans qu’il puisse être directement imputé à un éventuel effet nocebo de la crise médiatique de la rentrée 2017 (symptômes ressentis le plus souvent avant cette crise). Par ailleurs, ces effets indésirables peuvent mêler des signes d’hypo et d’hyperthyroïdie, alors qu’ils surviennentle plus souvent à TSH normale.

Comme le reconnaît le rapport résumé ci-dessus, il manque une explication à ce phénomène, même s’il a probablement été aggravé par des circonstances défavorables(monopole du LEVOTHYROX en France, pas d’expérimentation pilote, communication a minima de l’ANSM et absente de Merck, minimisation des symptômes par les pouvoirs publics, voire certains médecins, non respect des associations, crise
médiatique, pétitions et actions en justice, etc.).

Claude Pigement, vice-président de l’ANSM (sans rôle exécutif) et interrogé le 30 janvier 2018 par Le Parisien, se dit également préoccupé par « le fossé qui se creuse entre les affirmations d’une élite médicale et la parole des patients », qui vivent au quotidien avec leurs symptômes, et ce alors que la loi Kouchner de 2002 et la loi Touraine de 2016 ont pourtant réaffirmé la place importante des patients.
Il considère que « puisque l’incompréhension est totale entre les pouvoirs publics et les associations, une étude scientifique précise de ce qui s’est passé avec ce médicament devient nécessaire, et ce d’autant que 67 % des patients avaient une TSH normale ».
Publier le rapport de pharmacovigilance de 2012, repenser la communication de l’ANSM… et des « grands professeurs »

Claude Pigement estime que la publication de l’intégralité du rapport de pharmacovigilance de 2012 est nécessaire (NDLR : ce rapport, qui a motivé l’injonction de changement de formule, est résumé pages 15 et 16 de ce compte-rendu et n’a toujours pas été rendu public, malgré les demandes des associations de patients).

Claude Pigement reconnaît également un manque de réactivité de l’ANSM, qui « a sous-estimé la sensibilité de ce médicament et n’a pas délivré l’information adéquate », laissant les malades « dépourvus et en colère ». Il fustige les « grands professeurs » qui se sont retranchés derrière « l’effet nocebo, solution de facilité ».

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