2018, année de fusions et acquisitions chez les géants de la pharmacie
DOSSIER – Sanofi, Roche, Ge Healthcare, Ablynx, Celgene… qu’ils cherchent à vendre ou à acheter, l’année est à la concentration dans le secteur des ‘big pharma’.
Une chose est sûre : à la fin de cette année 2018, le paysage de l’industrie pharmaceutique ne ressemblera plus à ce qu’il était avant le 1er janvier. Dès le début de l’année, à l’occasion de la JP Morgan Healthcare, l’une des plus grosses conférences du secteur, le ton était donné. La réforme fiscale américaine, votée par le Sénat fin décembre 2017, allait permettre aux géants du pays de la pharmacie de reprendre les fusions et acquisitions (M & A).
Que ce soit le japonais Takeda prêt à se lancer dans le plus gros rachat de son histoire, le français Sanofi qui n’hésite pas à sortir le chéquierpour s’offrir deux biotechs, ou encore l’américain GE Healthcare qui s’associe à Roche… « Les Echos » vous propose de retrouver dans ce dossier les « méga deals » qui ont ponctué les trois premiers mois de l’année.
L’opération est la plus importante jamais réalisée par un groupe japonais à l’étranger, rapporte le Wall Street Journal. La deuxième date de 2016, avec le rachat du spécialiste britannique des semi-conducteurs, ARM Holdings, par SoftBank pour 31,8 milliards de dollars (26,8 milliards d’euros).
Avec cette acquisition, Takeda le huitième plus gros groupe pharmaceutique au monde avec un chiffre d’affaires cumulé de presque 31 milliards de dollars. Encore loin derrière le numéro un, l’américain Johnson&Johnson qui a engrangé 76,5 milliards de dollars de revenus en 2017.
25 avril – Shire pourrait accepter la 5e offre de Takeda à 52 milliards d’euros
Après avoir poliment refusé les quatre premières propositions de rachat formulées, depuis mars, par le groupe japonais Takeda, le conseil d’administration du laboratoire pharmaceutique irlandais Shire a annoncé qu’il était désormais favorable à une intégration au sein du géant nippon, dirigé par le Français Christophe Weber, pour un montant de 46 milliards de livres (52,6 milliards d’euros). Dans la dernière offre, Takeda aurait proposé 49 livres par action, dont 21,75 livres en numéraire et le reste en actions.
Dans un communiqué diffusé mardi soir, en Europe, le conseil de Shire a indiqué qu’il était désormais « prêt à recommander cette offre révisée de Takeda à ses actionnaires » et qu’il allait repousser la date butoir du 25 avril à laquelle un compromis aurait dû être trouvé entre les deux sociétés. Désormais, Takeda et Shire se donnent jusqu’au 8 mai pour finaliser leurs négociations.
19 avril – Procter & Gamble s’offre les activités de santé grand public de Merck
Le géant de Cincinnatti, déjà détenteur de marques comme Vicks ou Oral-B, rachète les activités de santé grand public du laboratoire allemand Merck. Procter & Gamble ajoute ainsi à sa besace des produits tels que les compléments alimentaires Seven Seas, mais aussi des vitamines, des analgésiques ou encore des décongestionnants comme Nasivin.
L’opération est valorisée 3,4 milliards d’euros. Pour Merck, il s’agit d’une porte de sortie idéale. Le laboratoire allemand cherche depuis septembre 2016 à vendre son pôle santé grand public pour renforcer ses autres divisions (santé, sciences de la vie, matériaux de haute performance) et financer davantage de travaux de recherche dans les médicaments sur ordonnance, dont des solutions contre le cancer comme Bavencio. Nestlé était sur les rangs ou encore Reckitt.
16 avril – Servier achète le département oncologie de Shire pour 2,4 milliards de dollars
Servier fait d’une pierre, deux coups : accélérant sa stratégie de développement dans le cancer et partant à la conquête les Etats-Unis, où le laboratoire vient tout juste de s’installer. Comment ? Le groupe a annoncé le rachat du département oncologie de Shire, pour 2,4 milliards de dollars (1,9 milliard d’euros).
L’opération comprend la cession de l’Oncaspar, un composant du traitement multi-agents de la leucémie lymphoblastique aiguë (LLA), actuellement sur le marché et développé par Shire, ainsi que les droits américains de l’Onivyde, contre le cancer du pancréas métastatique. Enfin, la transaction inclut le Calaspargase Pegol (Cal-PEG), encore soumis à l’examen de l’autorité de santé américaine (FDA) pour le traitement de la LLA.
5 avril – BioMérieux s’offre une biotech américaine
S’il en est un qui mise sur les acquisitions, c’est bien Alexandre Mérieux, le nouveau patron du spécialiste français de la microbiologie. Au moment de la présentation des résultats 2017 du laboratoire, il déclarait : « L’histoire de BioMérieux est faite de beaucoup d’acquisitions ».
Ce jeudi 5 avril, il a acquis Astute Medical pour 90 millions de dollars (74 millions d’euros), en numéraire. Cette biotech américaine est spécialisée dans la découverte de biomarqueurs permettant de détecter les patients qui ont un risque élevé de défaillance d’une fonction vitale ou de complications sévères.
28 mars – Takeda envisage de réaliser le plus gros rachat de son histoire
C’est la dernière annonce en date : le titre de l’industriel irlandais du médicament, Shire, s’envole en Bourse, gagnant plus de 20 %. La raison de ce soudain engouement des marchés ? L’annonce du géant pharmaceutique japonais Takeda, dirigé par le Français Christophe Weber, qui envisage de racheter l’entreprise.
Si aucune offre précise n’a été formellement formulée auprès du conseil d’administration de Shire, les spécialistes du secteur ont rapidement évalué cette opération aux alentours de 50 milliards de dollars. Il s’agirait alors du plus gros rachat de l’histoire du laboratoire japonais, après le rachat de Nycomed pour 13,7 milliards de dollars en 2011.
Takeda a de quoi s’intéresser à Shire. Le géant irlandais dispose de produits en développement dans le domaine des neurosciences, de l’immunologie et s’est largement orientié vers les maladies rares. Une branche sur laquelle le groupe japonais entend se développer.
27 mars – Novartis cède des parts dans l’automédication
Le groupe suisse a décidé de céder ses parts dans la division automédication qu’il cogérait avec le laboratoire britannique GSK.L’opération se chiffre à 13 milliards de dollars (10,4 milliards d’euros).
Cette activité englobe notamment l’antidouleur Panadol, des produits d’hygiène bucco-dentaire (dont le dentifrice Aquafresh) ou des traitements pour la peau (dont la crème contre l’herpès labial Zovirax), a généré en 2017 un chiffre d’affaires de 7,8 milliards de livres (8,9 milliards d’euros).
GSK bénéficiera désormais « de la totalité des recettes » et aura la marge de manoeuvre pour améliorer les revenus et le cash-flow. La marge opérationnelle du groupe pourrait ainsi approcher les 25 % en 2022, contre 18 % l’année dernière.
25 mars – Cerba continue les acquisitions stratégiques
Dans le secteur des analyses aussi, les choses évoluent. Le leadeur européen, Cerba, a annoncé avoir repris à Ardian les laboratoires BIO7, fondés au début des années 90 par leur actuel propriétaire, Frédéric Barroux.
Une transaction qui valorise ce spécialiste des examens de « routine » entre 450 millions et 500 millions d’euros, selon des sources. Surtout l’opération s’inscrit dans une guerre plus générale que se livrent les laboratoires d’analyses. Chacun tentant de mettre la main sur les meilleurs actifs du secteur. Une bataille que domine Cerba sur ses concurrents comme Labco ou Novescia.
29 janvier – Sanofi s’offre Ablynx au détriment de Novo Nordisk
Le groupe français aura déboursé 3,9 milliards d’euros pour ravir à son concurrent danois, Novo Nordisk, la biotech Ablynx. Les deux groupes avaient pourtant chacun une collaboration avec la sociétébasée à Gand et tous les deux étaient, avant tout, intéressés par le premier produit d’Ablynx, le caplacizumab, en attente du feu vert des autorités de santé européennes, pour le traitement d’une maladie hématologique rare.
Reprendre Ablynx prend un sens supplémentaire maintenant que Sanofi a acquis Bioverativ (voir au 22 janvier), une société justement spécialisée dans les maladies hématologiques, telles que l’hémophilie.
22 janvier – Celgene cherche un relais dans l’immunothérapie des cancers
La biotech américaine annonce vouloir acquérir Juno, l’un des leaders de ce secteur. L’opération, valorisée 9 milliards de dollars, devrait permettre à Celgène de trouver un relais pour contrer la prochaine perte de brevet de son produit phare, le Revlimid.
Pour la biotech américaine, qui possède déjà 10 % de Juno, il s’agit de l’une des plus grosses acquisitions. Au début du même mois, Celgen avait déjà annoncé une acquisition en cancérologie : celle d’Impact Biomedicines, une biotech développant un traitement contre un type de cancer de la moelle osseuse. Ce rachat annoncé à 1,1 milliard de dollars pourrait coûter jusqu’à 7 milliards de dollars à Celgene, en fonction du succès du produit.
22 janvier – Sanofi entre sur le marché de l’hémophilie
Après avoir échoué à mettre la main sur l’américain Medivation puis sur le suisse Actelion il y a deux ans, Sanofi s’offre Bioverativ, une spin-off de Biogen spécialisé dans les troubles de la coagulation. Le montant de l’opération est estimé à 11,6 milliards de dollars.
Confronté à la perte de brevets de son insuline vedette, le Lantus (15 % de son chiffre d’affaires), le laboratoire français chercher des relais de croissance. Avec Bioverative, il entend se renforcer dans les maladies rares, l’hémophilie étant la plus répandue d’entre elles.
21 janvier – Sanofi met en vente ses génériques européens
C’était une possibilité que le groupe français avait commencé à envisager dès 2015 : vendre Zentiva, sa division de génériques. En novembre 2016, le directeur général de Sanofi, Olivier Brandicourt a acté la vente des actifs européens. Le 22 janvier dernier, Sanofi a officiellement valorisé la cession à 2 milliards d’euros.
Fonds d’investissement(Blackstone, Carlyle, Advent, BC Partners, PAI, CVC, Apax et KKR) et industriels indiens (Zydus Cadila, Aurobindo, Torrent Pharma et Intas, allié à Chrys Capital) sont déjà engagés dans la bataille pour s’approprier ces actifs. Il faut dire que, si elles sont en recul au niveau global, les ventes de génériques de Sanofi sont toujours stables en Europe.
8 janvier – Roche et GE Healthcare s’allient dans les diagnostics médicaux
Aujourd’hui, il ne suffit plus de mettre au point des médicaments ou des tests, ou encore de produire des images, il faut aussi s’assurer qu’ils sont utilisés à bon escient. Dans ce contexte, l’accord entre GE Healthcare, un leader de l’imagerie médicale, et Roche, numéro un mondial du diagnostic médical, s’annonce comme un beau mariage.
Les deux groupes vont unir leurs efforts pour proposer aux professionnels de santé les moyens de prendre la meilleure décision clinique grâce à une vision la plus exhaustive possible de l’état de santé de leurs patients. Et cela, pour commencer, dans deux domaines thérapeutiques : le cancer et les soins intensifs.