Une infirmière dénonce « le flou médical » autour du Levothyrox 

Une infirmière dénonce "le flou médical" autour du Levothyrox 

Bien qu’il soit à l’origine de problèmes dont on ne connaît pas encore précisément la cause, il ne faut pas pour autant tout lui attribuer et être attentif aux carences alimentaires. © Richard BRUNEL

Servane prend du Levothyrox depuis 30 ans. Elle a toujours eu le même médicament, et tout se passait à merveille : « J’ai même eu trois grossesses, toutes se sont passées sans aucun soucis, l’ancienne formule me convenait tout à fait ». Lorsque, sans le savoir, elle change pour la nouvelle formule du médicament, elle vit le même enfer que beaucoup d’autres.

Un enfer au cours duquel elle ne se reconnaît plus, et pense devenir folle, au point que son médecin veut lui prescrire des anti-dépresseurs. Comme certains, elle finit par se fournir en Espagne en ancien Levothyrox, et l’effet est radical : « En trois semaines, je me sens normale, calme et apaisée, et je redeviens moi-même. »

Un corps médical dans le flou

Servane l’affirme, « les médecins sont extrêmement gênés par ce qu’il se passe. Ils ne savent pas quoi dire, et beaucoup autour de moi admettent ne pas avoir les réponses à ces questions, tout simplement. »

Tout cela provoque beaucoup de questions. Le constat, elle l’obtient quelques temps plus tard, alors qu’elle se rend chez son endocrinologue pour l’avertir qu’elle revient à l’ancienne formule, obtenue en Espagne : « En arrivant chez mon endocrinologue, j’ai appris que Merck (laboratoire producteur du Levothyrox NDLR) était passé la voir deux fois. Elle commence par me dire « Ne croyez pas ce que disent les médias, il n’y a que 0.75 % des patients qui sont touchés », et me déconseille vivement de revenir à l’ancienne formule. Elle me présente le L-Thyroxin, mais je m’aperçois vite qu’elle ne connaît pas le médicament quand elle ouvre un dictionnaire VIDAL d’une date antérieure à sa sortie. ».

Il y a de très bons spécialistes, mais ceux-là seront honnêtes avec vous et vous diront clairement qu’ils ne comprennent pas ce qu’il se passe avec la nouvelle formule du Levothyrox

SERVANE

Elle finit par tomber dans l’aberration la plus totale quand elle se rend compte que son endocrinologue découvre le médicament en même temps qu’elle, alors qu’elle s’apprêtait à le lui prescrire.

« Evidemment, tous ne travaillent pas de la même façon, il y a de très bons spécialistes, mais ceux-là seront honnêtes avec vous et vous diront clairement qu’ils ne comprennent pas ce qu’il se passe avec la nouvelle formule du Levothyrox. »

Ne pas tout ramener au médicament pour autant

Au regard de ce qu’elle a vécu, et de son métier d’infirmière, Servane nuance les problèmes qu’on veut bien affubler au Levothyrox NF, et insiste sur le fait que malgré les effets évidents qu’il a sur certains patients, il n’explique pas tout.

« Tous les effets secondaires qu’on recense ne sont pas tous dus au Levothyrox, et tout le monde n’est pas soumis, de manière générale, aux effets indésirables qu’on lui attribue. »

Il faut être vigilant et attentif à son rythme de vie, spécialement dans le cas des malades de la thyroïde

SERVANE

En effet, tous les symptômes, qu’on a tendance aujourd’hui à vouloir mettre en relation avec le changement de formule du médicament, ne viennent pas forcément de là. Parmi eux, la perte de cheveux notamment : « J’ai fait un bilan général lorsque j’ai commencé à me sentir vraiment mal, raconte Servane. Mes analyses ont montré des taux de fer et de vitamine D extrêmement bas, notamment à cause de mon alimentation. J’ai pris des compléments, et ces symptômes là ont été atténués, voire ont disparu. »

Levothyrox : ces Auvergnats qui ont arrêté et changé de formule

C’est pour cela qu’elle juge « évident, voire essentiel » d’effectuer un bilan général, afin de traiter chaque symptôme indépendamment et ne pas tirer de conclusions hâtives. La deuxième chose sur laquelle les patients ont du pouvoir, c’est le rythme de vie et l’alimentation : « Je sais par expérience que si je prends ou si je perds 3 kg, mon dosage ne sera plus bon, et je vais me retrouver en hypo, ou hyperthyroïdie. Il faut être vigilant et attentif à son rythme de vie, spécialement dans le cas des maladies de la thyroïde »

Un changement de formule qui intrigue

Cette question, Servane se la pose, encore et encore, depuis des mois : « Pourquoi Merck, qui était en position de quasi-monopole, se tire une balle dans le pied comme ça, alors que tous les autres laboratoire arrivent d’un coup avec d’autres formules à proposer ? »

«Il y a forcément quelqu’un à qui profite ce changement de formule. Une grande voix, qui étouffe toutes les petites voix qui tentent de faire entendre leur souffrance. »

SERVANE

Pour elle, il est aberrant, comme pour beaucoup de lecteurs qui avaient répondu à notre appel à témoignages, qu’une seule formule soit proposée pour soigner tous les malades de la thyroïde, alors même que ses pathologies sont très sensibles. Dans ce même appel à témoignages, beaucoup de questions ont été posées concernant le pourquoi, et surtout à qui profite ce changement de formule, alors que l’ancienne convenait à l’extrême majorité des patients français. Pour Servane, pas de réponse, mais une idée : « Il y a forcément quelqu’un. Une grande voix, qui étouffe toutes les petites voix qui tentent de faire entendre leur souffrance. »

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